Maladie de Marfan
Maladies Génétiques

Maladie de Marfan

Définition :La maladie de Marfan est la dystrophie héréditaire du tissu conjonctif la plus fréquente. il s’agit generalement d’une affection autosomique dominante, apparaissant comme sporadique dans 15 à 25%des cas.

Physiopathologie Génétique : une liaison génétique a été clairement établie entre plusieurs familles de maladie de Marfan et un des gènes des fibrillines (famille de glycoprotéines associées à l’élastine) situé sur le chromosome 15.
Dans ce gène (FBN1), plusieurs mutations ont été caractérisées.
Toutefois, les mutations de FBN1 ne sont pas constamment retrouvées au cours de la maladie de Marfan.
Par ailleurs, elles peuvent être également observées au cours de syndromes apparentés de pronostic différent (anévrisme aortique familial ou ectopia lentis).
La traduction biochimique de ces mutations est variable avec des modifications de la synthèse, de la sécrétion, de l’incorporation de la fibrilline dans le milieu extracellulaire ou avec fibrilline apparemment normale.
Les progrès considérables de la génétique moléculaire devraient permettre, dans les prochaines années, d’affiner la corrélation entre phénotype, génotype et anomalies biochimiques, de dépister les sujets asymptomatiques, et de proposer un conseil génétique.

Anatomopathologie : au niveau des artères, la média est préférentiellement touchée avec des fibres élastiques disloquées, hyperplasiées et une perte de cohésion des fibres musculaires lisses. Des zones lacunaires pseudokystiques sont remplies d’une substance prenant les colorations des protéoglycanes (bleu alcian, bleu de toluidine).
L’examen histologique des valvules cardiaques révèle également cette dégénérescence fibromyxoïde non spécifique.
Dans la peau, le réseau élastique papillaire est raréfié alors que les fibres élastiques du derme moyen et profond sont nombreuses et irrégulières.

Manifestations Cliniques :

A – Manifestations ostéoarticulaires :
Un morphotype particulier permet d’évoquer le diagnostic dès la naissance ou au cours de la première enfance.
Les malades sont grands, longilignes, avec un allongement excessif des membres (dolichosténomélie) prédominant à leur extrémité.
Les mains et les pieds allongés sont de plus décharnés, déformés en « pattes d’araignée » (arachnodactylie). Radiologiquement, les os des membres sont anormalement longs, les diaphyses et les épiphyses grêles.
Les vertèbres sacrées peuvent être érodées par une ectasie durale. Le thorax est presque constamment déformé en carène, en entonnoir, en « bréchet de pigeon ».
D’autres manifestations sont fréquentes : scoliose, diminution de la cyphose dorsale, voûte palatine ogivale, hyperlaxité ligamentaire…

B – Manifestations cardiovasculaires :
Présentes dans 95 % des cas, elles sont à rechercher systématiquement du fait de leur gravité (90 % des décès).
L’insuffisance aortique, la dissection et la rupture aortique sont les principales causes de décès précoces.
Une dilatation de l’aorte ascendante, localisée ou diffuse, serait présente dans 80 % des cas, habituellement sous-estimée par la radiographie thoracique de face car se projetant sur la silhouette cardiaque.
Elle est évaluée et surveillée par une échographie annuelle.
Le risque d’insuffisance aortique, de dissection ou de rupture aortique, augmente avec la diffusion et le degré de la dilatation aortique.
La pratique d’un scanner et/ou d’une imagerie par résonance magnétique (IRM) de l’aorte thoracique, tous les 2 ans, est également indispensable à la recherche d’un autre siège de dilatation aortique moins fréquent.
Un prolapsus affectant les deux feuillets mitraux est présent chez 60 à 80% des malades, avec épaississement de type myxoïde et risque d’évolution vers une insuffisance mitrale.
L’association à un prolapsus tricuspidien est fréquente. Plus rare est la survenue de dilatations anévrismales ou de dissections sur le réseau artériel pulmonaire ou les autres artères de gros ou moyen calibre.

C – Manifestations oculaires :
Les signes ophtalmologiques, présents dans 60 à 90 % des cas, sont parfois révélateurs.
La subluxation du cristallin, liée à l’insuffisance du ligament suspenseur, habituellement bilatérale et symétrique, est initialement asymptomatique, puis s’associe à une diminution de l’acuité visuelle.
Elle doit être systématiquement recherchée par un examen à la lampe à fente.
Elle peut se compliquer de glaucome aigu ou chronique, de décollement rétinien et de cécité.
Une myopie, un allongement du globe oculaire, une cataracte, une coloration bleutée des sclérotiques ou un kératocône peuvent également être observés.

D – Manifestations du système nerveux central :
Les anomalies ostéoneuroméningées lombosacrées font à présent partie des critères diagnostiques considérés comme les plus spécifiques.
Elles doivent être recherchées systématiquement par scanner et/ou IRM.
Une ectasie durale serait présente chez deux tiers des malades, correspondant à une expansion du sac dural résultant de la pression du liquide céphalorachidien sur une séreuse anormalement élastique.
La localisation en est essentiellement sacrée, du fait d’une forte pression sousarachnoïdienne à ce niveau.
L’évolution peut se faire vers une érosion vertébrale lombosacrée, un kyste arachnoïdien, plus rarement vers un méningocèle pelvien antérieur.
Ces lésions, le plus souvent asymptomatiques, peuvent se manifester par une compression des organes de voisinage, voire une méningite, après rupture spontanée ou fistulisation dans le rectum.

E – Manifestations cutanées : des vergetures sans cause évidente sont parfois présentes dans des localisations atypiques (pectorales, deltoïdiennes ou sur les cuisses). Des hernies inguinales ou sur des cicatrices sont signalées.

F – Manifestations Pulmonaire: Pneumothorax spontanés et les lésions emphysémateuses apicales résultent de la fragilité du tissu conjonctif pleural et interalvéolaire.

G – Manifestations digestives: Diverticulose digestive est parfois notée.

Diagnostic : evident dans les cas typiques, le diagnostic est plus difficile dans les formes paucisymptomatiques, notamment en l’absence d’antécédent familial. une réunion internationale d’experts a établi, en 1986, une liste de critères diagnostiques avec individualisation de critères majeurs.

Traitement : l’utilité d’un traitement bêtabloquant dans la prévention des complications aortiques, principale cause de décès, est démontrée, depuis la publication récente d’une étude randomisée comprenant 70 malades présentant une maladie de Marfan, avec une dilatation minime à modérée de l’aorte ascendante.

La progression du diamètre mesuré/diamètre théorique et le nombre d’événements cliniques (décès, insuffisance cardiaque ou aortique, dissection aortique ou chirurgie cardiovasculaire) étaient moins importants dans le groupe traité.
Le mode d’action des bêtabloquants semble plus complexe que la seule réduction de la pression artérielle.
Aussi, cette étude incite à débuter très précocement l’administration d’un traitement bêtabloquant au long cours.
Une surveillance est indispensable, par échographie, scanner et/ou IRM. Étant donnée la corrélation entre le risque d’insuffisance aortique ou de dissection aortique et la taille de la racine de l’aorte, un geste chirurgical préventif est actuellement proposé chez les malades dont le diamètre initial aortique dépasse 60mm, voire 55mm.
Ce geste associe un remplacement valvulaire aortique et un remplacement prothétique de l’aorte ascendante.
La chirurgie de l’insuffisance mitrale fait actuellement plus volontiers appel à une réparation par plastie plutôt qu’au remplacement prothétique.
Le danger maternel de la grossesse dépend surtout de l’importance des manifestations cardiovasculaires avant le début de celle-ci.
Si la dilatation aortique ne dépasse pas 40 mm et l’atteinte cardiaque est minime, le risque est limité, mais jamais nul.
Ailleurs, il existe un risque de dissection justifiant une surveillance étroite par échographie transoesophagienne, un traitement chirurgical en début de grossesse si l’anneau aortique dépasse 55 mm, l’utilisation prophylactique de bêtabloquants (métoprolol, aténolol) avec anticipation de leurs effets secondaires sur l’enfant (retard de croissance, bradycardie, hypoglycémie, hyperbilirubinémie…), et la pratique systématique d’une césarienne avant le début du travail.

En tout état de cause, il est nécessaire d’interdire toute activité sportive et de pratiquer une prophylaxie de l’endocardite bactérienne en cas d’insuffisance valvulaire.

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