Traumatisme crânien et conduite à tenir en situation d’urgence Cours de Neurologie

Traumatisme crânien et conduite à tenir en situation d’urgence

Traumatisme crânien et conduite à tenir en situation d’urgence

Épidémiologie : le traumatisme crânien est une des premières causes de mortalité chez l’adulte jeune et constitue un problème majeur de santé publique.
En effet, les lésions craniocérébrales sont potentiellement graves tant à court terme (risque vital) qu’à long terme (handicap physique et cognitif).

Le traumatisme crânien est plus fréquent chez l’homme que chez la femme (3 hommes pour 1 femme).
En ce qui concerne l’âge, 3 pics d’incidence ont été relevés : 5 ans, 15 à 24 ans et au-delà de 75 ans. La cause est un accident de la voie publique dans 60 % des cas, une chute dans 33 % des cas, les autres circonstances étant un malaise, une agression, une tentative de suicide…
Le coût des dépenses de santé liées au traitement des traumatismes représente le 4e poste après les maladies cardiovasculaires, les cancers, les maladies psychiatriques, de par la durée, le coût d’hospitalisation et le handicap physique et cognitif, lourd de conséquences sur le plan social.

Physiopathologie :
• Les traumatismes crâniens sont la conséquence :
– de chocs directs sur la tête avec le maximum de lésions en regard du point d’impact et des lésions de contrecoup diamétralement opposées ;
– de chocs indirects par phénomènes d’accélération ou décélération entraînant des déplacements du cerveau à l’intérieur de la boite crânienne avec contusion du parenchyme sur les reliefs osseux intracrâniens et (ou) cisaillement des axones et de la substance blanche ;
– de l’association des deux mécanismes.
• Le traumatisme crânien comporte dans son évolution temporelle, 2 types de lésions :
– les liaisons primaires sont immédiatement engendrées par l’impact (embarrure, hématome rapidement collecté…) ;
– pendant les heures et jours qui suivent le traumatisme, peuvent se surajouter des lésions secondaires liées à des facteurs soit systémiques (hypotension artérielle, hypoxie…), soit intracrâniens (oedème cérébral avec hypertension intracrânienne), crises comitiales, apparition secondaire d’un hématome intracrânien…).
Les lésions secondaires vont aggraver les lésions primaires du tissu nerveux.
Dans les 2 cas, la voie finale commune est constamment ischémique avec des conséquences sur la morbidité et la mortalité.
Il est donc impératif de corriger au mieux les facteurs systémiques et d’organiser une surveillance clinique et radiologique adéquate pour détecter à temps les lésions secondaires intracrâniennes.

Conduite à tenir devant un traumatisme crânien :
A – Sur les lieux de l’accident :
Un patient traumatisé crânien, a fortiori dans un contexte d’accident grave, est pris en charge classiquement par une équipe médicalisée d’urgence (pompiers, SAMU) qui évalue rapidement les points suivants.
• Le niveau de conscience : l’évaluation de l’état de conscience se fait en employant l’échelle de Glasgow (Glasgow coma scale – GCS) qui permet par la réalisation de tests simples et facilement reproductibles, d’attribuer un score de 15 à 3, en appréciant l’ouverture des yeux, la réponse motrice (en cas d’asymétrie de la réponse motrice, c’est la meilleure qui doit être prise en compte, la moins bonne réponse doit être interprétée comme un signe de localisation) et l’expression verbale.
Toutefois, cette échelle manque de précision en cas de nécessité d’intubation-ventilation immédiate ou en cas d’hématome orbitaire avec oedème palpébral empêchant l’ouverture spontanée des yeux.
En cas de coma grave (GCS < 7), l’échelle de Liège ajoute au GCS 5 réflexes du tronc cérébral, témoins de la souffrance axiale.
• S’assurer de la liberté des voies aériennes et de l’efficacité de la ventilation.
Dans le cas contraire, il faut intuber et ventiler le patient. L’intubation trachéale permet de maintenir la perméabilité des voies aériennes, tout en évitant le risque d’inhalation de liquide gastrique.
La ventilation mécanique permet un contrôle de la ventilation alvéolaire et de l’oxygénation du patient avec réduction de l’hypoxémie, source d’aggravation secondaire des lésions cérébrales.
Une fois intubé, le patient doit être ventilé avec pour objectif le maintien d’une PaO2 O 60 mmHg (Sp O2 > 95%) et d’une PaCO2 entre 35 et 40 mmHg.
• Maintenir une hémodynamique correcte : l’objectif est d’assurer une stabilité de la pression artérielle et une pression de perfusion cérébrale correcte.
Chez l’adulte, le traumatisme crânien isolé ne peut être considéré comme une cause d’hypotension ; celle-ci est en règle générale associée à une autre lésion hémorragique.
Chez le petit enfant au contraire, une plaie hémorragique du scalp peut être source d’hypotension artérielle par hypovolémie, ce qui doit conduire à une suture rapide des plaies de scalp.
Les solutés de remplissage recommandés en cas d’hypotension artérielle sont le sérum salé isotonique à 0,9 %, associé si nécessaire aux macromolécules.
En présence de signes évocateurs d’engagement, le recours au mannitol à 20 % est recommandé à la posologie de 0,25 à 1 g/kg injecté en 20 min.
Les médicaments vaso-actifs sont indiqués dès lors que les conditions de remplissage vasculaire étant correctes, la pression artérielle ne peut être maintenue.
• Rechercher un polytraumatisme (fracture ouverte…).
• Veiller au déplacement du blessé avec la totalité du rachis maintenue en traction.
• Rechercher par l’interrogatoire du patient ou des témoins :
– les circonstances et l’heure de l’accident ;
– la notion d’une perte de connaissance brève initiale ;
– les antécédents notables (notion de traitement anticoagulant…)
• Effectuer un examen neurologique rapide par la recherche d’un déficit moteur, de la sensibilité, une anomalie des réflexes.
L’examen des pupilles doit étudier leur taille (myosis, mydriase, anisocorie), leur réactivité à la lumière.
L’examen du cuir chevelu recherche une plaie (l’orifice d’entrée et éventuellement de sortie d’un projectile en cas de plaie par arme à feu), un hématome sous-cutané.
Toutes ces informations doivent être clairement transcrites sur la fiche d’accompagnement du patient pour être transmises à l’équipe médicale qui recevra le patient à l’hôpital.
Cet examen clinique initial doit être réalisé avant la mise en oeuvre de tout traitement de neuro-sédation.
B – À l’hôpital :
Après avoir pris connaissance de l’examen clinique initial et des premières mesures thérapeutiques, il est indispensable de refaire un examen neurologique.
• Chez le patient conscient, l’examen neurologique doit être complet avec :
– évaluation précise du score de Glasgow (traumatisme crânien bénin si GCS > 13) ;
– examen de la motricité ;
– examen de la sensibilité ;
– recherche des réflexes ostéotendineux et du réflexe cutané plantaire ;
– examen des fonctions supérieures (langage, mémoire…) ;
– examen du champ visuel ;
– examen des fonctions cérébelleuses ;
– examen des paires crâniennes.
• Chez le patient obnubilé ou comateux, l’examen neurologique est limité. il faut rechercher :
– à réévaluer le score de Glasgow, au besoin complété par l’échelle de Liège ;
– des signes témoins de la profondeur du coma et de la gravité des lésions encéphaliques avec souffrance axiale, diencéphalique ou du tronc cérébral : . une hypertonie bilatérale en décortication ou mouvements d’extension uni- ou bilatérale en décérébration, . des mouvements oculaires anormaux spontanés, . une déviation des globes oculaires, . une anisocorie et (ou) aréactivité des pupilles, . des troubles neurovégétatifs (hypertension artérielle, bradycardie, troubles du rythme respiratoire avec pauses respiratoires, respiration de Cheyne-Stokes…) ;
– un signe de localisation (asymétrie motrice à une stimulation douloureuse, anisocorie) ;
– des plaies, un hématome sous-cutané, une embarrure dans le cuir chevelu ;
– une fuite de liquide céphalorachidien ou une hémorragie par le nez ou l’oreille.
• L’interprétation des signes neurologiques est parfois délicate. il peut s’agir :
– d’un déficit post-critique en cas de survenue d’une crise d’épilepsie focalisée au préalable ;
– d’un déficit hémisphérique d’origine ischémique secondaire à un traumatisme de la carotide extracrânienne (dissection) ou une embolie graisseuse par fracture des membres.
Les nerfs crâniens peuvent être lésés dans leur traversée de la base du crâne ou dans leur trajet extracrânien.
Il peut exister une lésion médullaire associée responsable de signes neurologiques aux membres ou un traumatisme du plexus brachial.
Il peut exister une pathologie prétraumatique, par exemple un accident vasculaire cérébral à l’origine du traumatisme crânien et dont les signes cliniques se superposent à ceux du traumatisme.
Il peut exister des signes méningés en relation avec une hémorragie méningée post-traumatique.
• Au terme de l’examen clinique, on pourra différencier :
– les traumatismes crâniens bénins sans trouble de conscience (GCS O 13) avec examen neurologique normal ;
– les traumatismes de gravité moyenne (8 < GCS o 12) avec peu ou pas de signes neurologiques de localisation ;
– les traumatismes graves (GCS o 8) avec signes neurologiques de localisation.
Cette classification semble être corrélée au pronostic des traumatismes crâniens et impose une stratégie thérapeutique adaptée.

Examens paracliniques :
• L’examen du fond d’oeil est inutile voire dangereux (notamment en cas d’utilisation de mydriatiques).
En pratique, il n’est plus effectué.
• Les radiographies du crâne prêtent à discussion : elles sont inutiles en cas de traumatisme crânien grave car le scanner indispensable dans ce cas aura un bien meilleur rendement mais elles restent utiles pour le traumatisme crânien bénin à condition que la technique soit irréprochable.
Elles pourront montrer un trait de fracture, une embarrure, une pneumatocèle.
Chez ces patients, la présence d’une fracture augmente de façon significative le risque d’hématome extradural et invite à une surveillance rigoureuse.
• La tomodensitométrie crânienne (scanner) lors de l’admission n’est pas indiquée en cas de traumatisme bénin mais est indiquée en cas de traumatisme de gravité moyenne s’il existe des signes de localisation.
Elle est indiquée dans tous les cas de traumatisme crânien grave ainsi que si l’on craint une aggravation secondaire entre la prise en charge sur les lieux de l’accident et l’admission au centre hospitalier.
• Les radiographies de rachis cervical sont indispensables pour tout traumatisme crânien grave.
• L’électroencéphalogramme n’a pas d’intérêt lors de la prise en charge initiale.
Il peut être indiqué au cours de l’hospitalisation en cas de suspicion de crises infracliniques ou pour la surveillance des comas profonds et des malades sous sédation.
• L’artériographie cérébrale a une indication exceptionnelle à la phase précoce d’un traumatisme crânien généralement grave, notamment pour la recherche d’une dissection artérielle intra- ou extracrânienne, d’une fistule carotido-caverneuse ou de la survenue rare d’un anévrisme post-traumatique (un peu plus fréquent dans le cadre des plaies cranio-cérébrales par arme à feu).
• L’imagerie par résonance magnétique cérébrale n’est pas supérieure au scanner à la phase précoce de la prise en charge des traumatismes crâniens.
Sa sensibilité est meilleure que celle du scanner dans la détection en cours d’évolution de petites lésions du tronc cérébral mais en terme de pronostic, il n’a pas été montré de corrélation significative entre la récupération neurologique, le nombre et la localisation des lésions touchant le tronc cérébral et le corps calleux.
• La ponction lombaire n’a aucune indication dans les traumatismes crâniens sauf s’il y a suspicion clinique de méningite et dans ce cas doit toujours être réalisée après un scanner cérébral.
• Autres examens paracliniques :
– un bilan biologique minimal d’entrée est prudent (ionogramme sanguin, numération formule sanguine, hémostase, groupe sanguin, recherche d’anticorps irréguliers anti-érythrocytaires et alcoolémie si suspicion d’intoxication alcoolique aiguë) ;
– radiographie pulmonaire ;
– gaz du sang s’il y a une anomalie de ventilation ;
– échographie abdominale au moindre doute sur un abdomen douloureux, à la recherche d’une lésion hémorragique ;
– radiographies des membres si l’examen clinique est anormal ;
– radiographies du rachis entier si on suspecte un traumatisme du rachis.

Diagnostic des lésions secondaires :
Quelle que soit la gravité du traumatisme initial, des complications précoces peuvent survenir et relever d’un traitement spécifique (chirurgical ou médical).
Chaque traumatisé crânien doit pouvoir bénéficier :
– d’une surveillance clinique avec surveillance de la conscience et de l’examen neurologique ;
– d’un scanner cérébral en cas de modification de l’examen neurologique initial ;
– d’une mesure par enregistrement continu de la pression intracrânienne en cas de traumatisme crânien grave avec signes d’hypertension intracrânienne au scanner et devant être traité par neurosédation.

A – Traumatismes crâniens bénins :
Après examen neurologique normal et radiographies du crâne, les patients conscients, ayant eu un traumatisme crânien bénin avec perte de connaissance initiale, doivent bénéficier d’une surveillance neurologique à l’hôpital pendant 24 à 48 heures.
Parfois, en présence d’un patient coopérant et d’une famille proche capable de comprendre les consignes de surveillance, il est possible d’autoriser cette surveillance à domicile.
Le patient devra alors être conduit au centre hospitalier le plus proche si son état clinique se modifie.
Néanmoins, il faut garder sous surveillance médicale les populations à risque : personnes appartenant à des milieux défavorisés, éthyliques, sans domicile fixe, âgées, souffrant de troubles de la coagulation spontanés ou iatrogéniques (traitements anticoagulants), les patients avec fracture du crâne.
L’évolution est imprévisible :
– habituellement favorable avec guérison sans séquelles ;
– parfois survenue d’une complication avec hématome extradural (surtout en présence d’une fracture du crâne) ou d’un hématome sous-dural aigu (sujets éthyliques, troubles de la coagulation, patients âgés).

B – Traumatismes de gravité moyenne :
L’hospitalisation s’impose mais pas systématiquement en milieu spécialisé avec pour objectifs :
– une surveillance clinique régulière portant sur l’état de conscience et l’examen neurologique à la recherche d’éventuels signes de localisation secondaires ;
– un scanner cérébral initial à répéter éventuellement si l’examen neurologique se modifie ;
– la mise en route d’un traitement symptomatique simple associant antalgiques, antinauséeux si besoin.
La mise en route d’un traitement antiépileptique prophylactique n’est recommandée qu’en cas de lésions cérébrales objectivées au scanner (contusion cérébrale, hématome intracrânien ne relevant pas initialement d’un traitement chirurgical).
Il devra être de courte durée (maximum 2 mois en cas d’une évolution clinique favorable).

C – Traumatismes crâniens graves :
Après examen clinique initial et mise en route sur le terrain des premières mesures de réanimation, l’hospitalisation en milieu spécialisé s’impose, soit dans le secteur réanimation d’un service de neurochirurgie, soit dans un service de réanimation polyvalente à proximité d’un service de neurochirurgie.
• Le scanner initial fait état des lésions cérébrales dont certaines peuvent être immédiatement chirurgicales.
La plupart du temps, il s’agit d’un examen de référence guidant la stratégie thérapeutique.
• La thérapeutique doit avoir pour objectifs :
– une ventilation adéquate avec une PaCO2 entre 35 et 40 mmHg. Une hyperventilation ne se décide que sur des arguments objectifs d’aggravation d’une hypertension intracrânienne ;
– une bonne pression de perfusion cérébrale (de l’ordre de 70 mmHg) avec par conséquent l’objectif d’une hémodynamique stable ;
– un contrôle en permanence de la pression intracrânienne par enregistrement continu par la mise en place intraparenchymateuse d’un capteur de mesure ;
– une neurosédation adaptée aux valeurs de la pression intracrânienne et aux données du scanner initial ;
– une surveillance clinique et scanographique régulière.

Principaux types de lésions cranio-cérébrales traumatiques :
Les lésions cranio-cérébrales peuvent survenir chez tous les traumatisés crâniens.
Elles se manifestent par une modification de l’examen neurologique et sont diagnostiquées sur le scanner pratiqué en urgence.

A – Hématome extradural :
Il s’agit d’une collection de sang frais (caillot frais organisé) située entre la voûte du crâne et la dure-mère qui est ainsi décollée et repoussée.
L’origine du saignement est le plus souvent une déchirure de l’artère méningée moyenne ou de l’une de ses branches en regard d’un trait de fracture, ou plus rarement de la déchirure d’un sinus dure-mérien en regard d’une fracture.
L’hématome extradural est très rare chez le patient âgé en raison de l’adhérence très forte de la dure-mère à l’os.
• La symptomatologie clinique habituelle évolue typiquement en 3 temps (traumatisme, intervalle libre, aggravation neurologique) :
– le traumatisme est d’importance variable, le plus souvent associé à une perte de connaissance brève initiale ;
– puis, il existe un intervalle libre de 6 à 24 heures, sans symptôme particulier en dehors de céphalées banales ;
– puis, des signes d’hypertension intracrânienne avec céphalées tenaces, obnubilation, troubles de la conscience pouvant aller jusqu’au coma, apparition d’un déficit neurologique avec déficit moteur controlatéral à l’hématome, engagement cérébral avec mouvement de décérébration, mydriase aréactive homolatérale.
L’évolution est rapidement mortelle en l’absence de traitement adéquat.
• Dans certaines situations, la clinique est moins typique :
– absence d’intervalle libre (ou très court), notamment lors de traumatisme crânien grave où le patient est d’emblée comateux ;
– pas ou peu de signes neurologiques (ou d’apparition plus tardive) pour les hématomes extraduraux situés en région « moins parlante » (cortex préfrontal, vertex, région occipitale).
• Le diagnostic est assuré par le scanner sans injection.
Il montre l’hématome sous la forme d’une hyperdensité spontanée extraparenchymateuse, en lentille biconvexe.
Il objective la topographie, la taille de l’hématome, l’effet de masse exercé sur le parenchyme cérébral, les éventuelles lésions associées du parenchyme cérébral sous-jacent ou controlatéral.
• Le traitement est chirurgical avec transfert en urgence par SAMU en neurochirurgie.
Il s’agit d’une chirurgie sous anesthésie générale, par volet crânien, permettant l’évacuation de l’hématome, l’hémostase du vaisseau responsable et la suspension de la dure-mère aux berges de la craniotomie pour éviter la récidive.
Le traitement médical associé comprend des mesures de réanimation avec traitement de l’hypertension intracrânienne et la mise en route d’un traitement anti-épileptique prophylactique.
Opéré tôt, avant les signes de souffrance du tronc cérébral, le pronostic est favorable en l’absence de lésions parenchymateuses graves associées.

B – Hématome sous-dural aigu : il s’agit d’un épanchement de sang frais entre le cortex cérébral et la dure-mère, consécutif à un choc indirect habituellement sans fracture du crâne.
La lésion primaire est la rupture d’une veine cortico-durale, plus rarement une plaie d’une artère corticale.
L’hématome se développe rapidement à l’ensemble de l’espace sous-dural.
Il s’associe généralement à des lésions parenchymateuses sous-jacentes (contusion hémorragique, oedème cérébral).
L’hématome sous-dural aigu est plus fréquent chez le patient âgé ou l’éthylique chronique (en raison de l’atrophie cérébrale plus fréquemment rencontrée dans cette population).
• Le tableau clinique est généralement aigu avec intervalle libre court après le traumatisme, troubles de conscience d’aggravation rapide, déficit moteur. L’évolution se fait rapidement vers un coma grave avec signes d’engagement cérébral.
• Le scanner cérébral sans injection objective l’hématome sous la forme d’une hyperdensité spontanée extraparenchymateuse, convexe en dehors, concave en dedans, volontiers étendue tout le long de l’hémisphère cérébral, avec engagement de la ligne médiane.
Il montre les lésions parenchymateuses associées (contusion oedémateuse, contusion hémorragique, hématome intracérébral).
• Le traitement est neurochirurgical en urgence avant la survenue de signes de souffrance irréversible du tronc cérébral.
Il s’agit d’une chirurgie par volet : ouverture de la dure-mère, évacuation rapide de l’hématome, hémostase locale et lavage de l’espace sous-dural au sérum physiologique puis fermeture rapide avant que l’oedème cérébral ne soit trop proéminent.
On y associe volontiers la mise en place d’un capteur d’enregistrement de la pression intracrânienne.
Parfois, on peut être amené à poser une contre-indication chirurgicale en fonction de l’âge, de l’état général, de la gravité du tableau neurologique et de la gravité des séquelles neurologiques prévisibles.
Le pronostic est sévère avec une mortalité de 50 % à 80 % selon les études publiées.

C – Contusion et hématome intraparenchymateux :
La contusion est une lésion parenchymateuse associant pétéchies hémorragiques et oedème cérébral réactionnel.
Dans certains cas, au cours de l’évolution, les pétéchies hémorragiques s’aggravent pour constituer un hématome intracérébral.
• Clinique : après un traumatisme important, aggravation neurologique secondaire avec signes neurologiques de localisation.
• Le scanner montre initialement la contusion sous la forme d’une hyperdensité spontanée intraparenchymateuse hétérogène et mal limitée au sein d’une zone hypodense (oedème).
L’hématome apparaît comme une hyperdensité spontanée collectée.
• Le traitement est d’abord médical au stade de la contusion sans effet de masse.
En cas d’aggravation de la contusion et d’hématome collecté, avec effet de masse, l’indication chirurgicale pour évacuation est discutée en tenant compte de la topographie et de l’importance des séquelles fonctionnelles prévisibles.

D – OEdème cérébral diffus (brain swelling) :
Un oedème cérébral diffus peut se constituer au contact d’un foyer de contusion cérébrale ou en l’absence de lésion parenchymateuse visible au scanner initial.
Il s’agit alors de lésions axonales diffuses avec oedème vasogénique et cytotoxique.
L’oedème cérébral diffus se voit plus souvent chez l’enfant ou l’adolescent que chez l’adulte.
• Clinique : après traumatisme crânien violent, il apparaît une détérioration rapide de l’état de conscience évoluant vers un coma profond avec des signes de souffrance axiale et des troubles neurovégétatifs.
• Le scanner montre une hypodensité globale de l’ensemble des hémisphères cérébraux, une disparition des sillons corticaux et des citernes de la base, un effacement des ventricules.
• La pression intracrânienne est élevée avec instabilité de la pression de perfusion cérébrale et du débit sanguin cérébral.
• Le traitement fait appel à la neurosédation avec techniques de réanimation intensive et lourde.
Le pronostic est grave.

E – Plaies cranio-cérébrales et embarrures :
Les plaies cranio-cérébrales surviennent le plus souvent après plaie par arme à feu ou arme blanche ou lors de chute ou d’accident de la voie publique violent.
Les embarrures représentent une fracture complexe de la voûte du crâne avec enfoncement d’une partie de celuici.
Les embarrures peuvent être ouvertes (équivalent de plaie cranio-cérébrale) ou fermées.
• La clinique dépend essentiellement des lésions cérébrales associées et de la topographie de la plaie craniocérébrale ou de l’embarrure.
• Le scanner cérébral sans injection permet d’objectiver les lésions osseuses et les lésions parenchymateuses associées.
• Le traitement neurochirurgical s’impose en urgence pour les plaies cranio-cérébrales et embarrure ouverte.
Il consiste à faire un parage soigneux plan par plan et à lever l’embarrure sous couvert d’un traitement antibiotique périopératoire.
À noter que la vaccination antitétanique doit être contrôlée et remise à jour si nécessaire.
Les plaies cranio-cérébrales par arme à feu (notamment pistolet à grenaille) sont traitées pour le parage chirurgical des points d’entrée et de sortie s’ils existent.
Par contre, il est impossible de chercher à extraire les éclats de grenaille au sein du cerveau.
Ces patients devront être surveillés à distance de l’accident en raison du risque d’abcès cérébral.
Les embarrures fermées relèvent d’un traitement neurochirurgical si le déplacement de l’os est important, entraînant une compression du parenchyme cérébral avoisinant ou si l’embarrure est à l’origine de crises d’épilepsie, témoins d’une irritation corticale locale.

F – Fractures de la base du crâne :
Elles concernent essentiellement l’étage antérieur du crâne. Elles peuvent être associées à des brèches ostéoméningées et se révéler par une fuite de liquide céphalorachidien (par le nez ou les oreilles) ou une méningite.
Ces signes cliniques sont rarement présents au décours immédiat du traumatisme en raison de la présence habituelle d’un oedème cérébral qui « colmate » la brèche.
Ils apparaissent plutôt au bout de quelques jours lorsque l’oedème régresse.
• Le scanner cérébral avec étude en « fenêtres osseuses » avec éventuellement injection intrathécale de produit radio-opaque et reconstruction en coupes coronales, permet d’objectiver les lésions osseuses, le ou les sites de brèche dure-mérienne et la pneumatocèle intracrânienne (présence d’air dans les espaces sous-arachnoïdiens).
• Le traitement neurochirurgical s’impose (sans caractère d’urgence) dès lors que la brèche ostéoméningée est symptomatique.

G – Hématome sous-dural chronique :
Il s’agit d’un épanchement de sang lysé collecté entre le cortex et la dure-mère.
Il survient très souvent chez les patients âgés ou éthyliques chroniques (atrophie cérébrale) ou est favorisé par un traitement anticoagulant au long cours.
• La symptomatologie clinique apparaît plusieurs semaines après un traumatisme bénin parfois oublié par le patient sous la forme d’un syndrome d’hypertension intracrânienne progressif avec céphalées, ralentissement psychique, syndrome confusionnel ou démentiel, hémiparésie progressive.
En l’absence de traitement, l’évolution se fait vers l’engagement temporal et le décès.
• Le scanner cérébral sans injection objective une collection hypodense extraparenchymateuse juxta-osseuse à bords parallèles associée à un effet de masse sur le cerveau.
L’hématome est parfois bilatéral, faisant alors disparaître l’effet de masse.
Il peut être aussi isodense au parenchyme et ne se remarque que par l’effet de masse qu’il entraîne.
• Le traitement est neurochirurgical dès lors que les signes cliniques sont présents ou qu’il existe un effet de masse au scanner.
Il consiste en l’évacuation de l’hématome lysé par un simple trou de trépan, généralement sous anesthésie locale.

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