Dysplasie fibreuse Rhumatologie

Dysplasie fibreuse

Introduction :
A – DÉFINITION :
La dysplasie fibreuse (DF) est une affection sporadique, peu fréquente, caractérisée par un défaut de maturation osseuse à un ou plusieurs endroits du squelette.
Selon la nomenclature internationale des maladies génétiques, la DF est caractérisée par les paramètres suivants :

  • mode de transmission sporadique et en « mosaïque » ;
  • absence à la naissance ;
  • association au locus chromosomique 20q13 et au gène GNAS1.

B – NOMENCLATURE : Son nom fut proposé par Jaffe et Lichtenstein en 1942. Le terme « maladie de Jaffe et Lichtenstein » est parfois utilisé comme synonyme.
Il existe des formes monostotiques et des formes polyostotiques. Il ne faut pas confondre la DF avec la dysplasie ostéofibreuse (ou ostéofibrodysplasie de Campanacci), affection différente présentant une certaine parenté avec l’adamantinome. La DF peut exister à titre isolé ou s’inscrire dans un contexte syndromique.
McCune en 1936 et Albright en 1937 ont décrit de façon indépendante une triade qui associe une DF polyostotique, une pigmentation cutanée anormale et une puberté précoce.
Selon les conceptions actuelles de la maladie, plutôt que de se limiter à la puberté précoce, on admet l’existence possible d’endocrinopathies variables, parfois multiples.
Cette triade est connue sous le nom de syndrome de McCune-Albright (SMA) ou de syndrome d’Albright.
Le syndrome de Mazabraud, plus rare, est une association de lésions osseuses et de myxomes intramusculaires.

C – COMPLICATION : La transformation maligne en sarcome est une complication rare de la maladie. Celle -ci peut s’accompagner de fractures répétées avec douleur, déformation et perte fonctionnelle.

D – ÉPIDÉMIOLOGIE ET LOCALISATION :
La DF représente environ 1 % des tumeurs osseuses primitives.
La forme monostotique est six fois plus fréquente que la forme polyostotique.
L’âge au moment du diagnostic varie entre 5 et 30 ans.
Le sexe féminin représente la moitié des cas de DF simple, et la grande majorité des cas de SMA.
Tout os peut être atteint dans la DF.
Dans la maladie monostotique, par ordre de fréquence décroissante, on note l’atteinte de l’os maxillaire, du fémur proximal, du tibia, puis, de façon moins fréquente, de l’humérus, des côtes, du radius et de l’os iliaque.
Dans la forme polyostotique, le fémur proximal est le site de prédilection.
Les atteintes proximales des membres sont plus fréquentes et plus sévères que les atteintes distales.
Une distribution unilatérale est notée dans la plupart des cas de DF polyostotique, y compris dans le SMA.
Il peut s’agir d’une atteinte multifocale d’un membre inférieur et de son hémibassin, d’une atteinte du membre supérieur (forme monomélique) ou encore d’une atteinte de tout un hémicorps.
L’atteinte des os de la main ou du pied est rare. Les vertèbres sont épargnées dans la plupart des cas.
Aux os longs, l’atteinte est endomédullaire, tandis que son extension est généralement excentrique : la maladie débute dans la région métaphysaire puis s’étend vers la région diaphysaire de façon variable.
Lorsqu’ils sont ouverts, les cartilages de croissance sont épargnés par le processus : ils agissent comme une véritable barrière à l’extension de la maladie.
Les taches de pigmentation cutanées qui sont associées aux lésions osseuses sont présentes dans 20 % des cas, surtout dans la forme polyostotique.
Elles se situent souvent en regard d’une lésion osseuse sous-jacente.

E – ÉTIOLOGIE :
Les études portant sur les mutations du gène qui codifient la fraction alpha de Gs (il s’agit de la protéine G qui stimule la formation de l’adénosine 3’, 5’- monophosphate cyclique (AMPc), effectuées dans le contexte du SMA, ont permis de préciser qu’il y avait une étiopathologie unique pour les différentes atteintes des tissus concernés par ce syndrome.
Par la suite , la même anomalie fut dépistée dans la DF isolée, qu’elle soit mono- ou polyostotique.
Dans la DF, l’examen anatomopathologique montre la présence d’un os de type membranaire ; il y a une augmentation de production de la matrice osseuse et une fibrose médullaire diffuse, constatation suggérant une anomalie des ostéoblastes.
Marie et al ont montré que les ostéoblastes porteurs de la mutation du Gs 2 présentaient une augmentation de l’AMPc intracellulaire, une augmentation de la prolifération cellulaire , une diminution de la production d’ostéocalcine (indice de maturation), tandis que la réponse aux hormones calcitropiques reste normale.
Sur le plan histologique, cette mutation se traduit par une production augmentée de collagène (plutôt que d’ostéoïde) par les cellules ostéoblastiques immatures.
Ces observations concordent avec d’autres études qui ont montré que l’activation anormale de la signalisation par l’AMPc stimule la croissance des divers tissus impliqués dans le SMA (gonades, thyroïde, surrénales et mélanocytes).
Il a en outre été établi que les cellules fibroblastiques cultivées à partir de cellules lésionnelles de DF dans le contexte du SMA, porteuses de la mutation du Gs, présentaient une sécrétion augmentée de l’interleukine (IL) 6, qui pourrait être responsable de l’ostéolyse constatée dans certains de ces cas.
D’autres études ont montré que l’IL6 n’a aucun effet sur la croissance ostéoblastique in vitro, donc qu’elle n’est probablement pas responsable de la différenciation ni de la prolifération cellulaire observée dans la DF.
Selon les constatations de plusieurs auteurs, le proto-oncogène c-fos semble jouer un rôle important dans la régulation de la différenciation comme de la croissance des ostéoblastes normaux.
Selon Singer, les mutations de Gs, activantes de l’adénylate cyclase, seraient dans la DF une expression exagérée du protooncogène c-fos et de sa protéine.
Candelière a montré qu’il y avait une expression anormalement élevée de c-fos dans les lésions de la DF.
Il en a déduit que cette expression augmentée de c-fos pourrait représenter la première étape d’une séquence d’ événements menant à l’oncogenèse des sarcomes qui surviennent parfois sur les foyers de DF.
L’étude de pièces osseuses de patients atteints du SMA montre un dépôt de collagène en fascicules perpendiculaires à la surface de l’os immature en formation, ce qui contraste avec l’ orientation parallèle que l’on rencontre dans l’os normal mature et immature.
Par endroits, les cellules ostéoblastiques se rétractent, donnant des aspects pseudolacunaires.
Ces changements peuvent être reproduits in vitro en ajoutant à des cellules ostéoblastiques normales un excès d’AMPc : ils sont réversibles.
Il semble que le nombre d’ostéoclastes présents dans ou autour des lésions dysplasiques soit anormalement élevé.
Notre conception de l’étiopathogénie de la DF peut donc être résumée de la façon suivante à la lumière des différentes études récemment publiées : la DF est plus qu’une métaplasie fibroosseuse ; elle est le résultat d’un excès de cellules préostéogéniques qui produisent une matrice de collagène désorganisée ; l’ activité ostéogénique fabrique de l’os immature par le biais d’une matrice désorganisée.
L’activité ostéoclastique est anormalement élevée et représente probablement un mécanisme d’extension de la maladie.
 

Étude clinique : Le fait que la mutation du GSA1 concerne de nombreux organes cibles (peau, os, viscères) explique les tableaux cliniques extrêmement variés.
A – FORME MONOSTOTIQUE : C’est la forme la plus discrète. Les lésions ne sont souvent découvertes qu’à l’âge adulte et parfois de façon fortuite. Lorsque les atteintes sont symptomatiques, elles sont généralement peu douloureuses et se stabilisent volontiers au-delà de la maturation squelettique.
B – FORMES POLYOSTOTIQUES :
Elles peuvent être plus ou moins diffuses ; la sévérité des lésions est proportionnelle à leur nombre.
Dans les formes sévères, il existe volontiers des déformations des membres, s’accompagnant de douleurs et de troubles fonctionnels.
L’atteinte cutanée et les maladies endocriniennes sont habituellement plus marquées dans les formes polyostotiques généralisées que dans les formes intermédiaires.
Généralement, lorsque la maladie est sévère, les symptômes sont précoces et évoluent plus vite.
C – MALADIES ENDOCRINIENNES RENCONTRÉES DANS LE SYNDROME DE MCCUNE-ALBRIGHT : Elles sont variées. Il peut s’agir d’acromégalie, de gigantisme, d’hyperprolactinémie, d’hyperthyroïdie, d’hyperparathyroïdie, de syndrome de Cushing, d’hypogonadisme hypothalamique et de rachitisme hypophosphatémique.
La puberté précoce existe chez environ 20 % des filles atteintes de DF polyostotique.
Elle est beaucoup moins fréquente chez le garçon.
C’est le saignement vaginal anormal qui est le symptôme le plus souvent associé à la DF polyostotique.
D – LÉSIONS CUTANÉES CONSTATÉES DANS LE SYNDROME DE MCCUNE-ALBRIGHT : Elles sont présentes dans 20 % des cas de DF.
Elles sont généralement peu nombreuses et se situent en regard des atteintes osseuses. Elles résultent du développement de macules mélanotiques (reflet de la mutation GNAS1), le nombre de mélanocytes étant cependant normal.
Les taches cutanées sont brunâtres et de tonalité plus ou moins foncée.
Leurs contours sont irréguliers, aigus, ce qui permet de les distinguer des lésions cutanées de la neurofibromatose.
E – SYNDROME DE MAZABRAUD : Il est rare. Szendroi et al en ont rapporté trois cas en 1998. Le nombre total de cas répertoriés dans la littérature est de 27. Il existe une nette prédominance féminine. À la maladie polyostotique s’associent des myxomes intramusculaires multiples.
Les myxomes sont le plus souvent voisins des lésions osseuses.
Ils apparaissent tardivement au cours de l’évolution de la DF.
Ils ont tendance à grossir, à récidiver après exérèse et ceci parfois très tardivement.
La dégénérescence sarcomateuse de ces myxomes est un fait connu.
F – DÉGÉNÉRESCENCE SARCOMATEUSE : Plusieurs auteurs ont rapporté l’existence de sarcomes osseux se développant sur des lésions de DF, qu’elles aient été ou non irradiées. La fréquence varie entre 0,3 % dans la maladie monostotique et 4 % dans le SMA.
Par ordre de fréquence décroissante, le type de sarcome constaté est : l’ostéosarcome, le fibrosarcome, le chondrosarcome et l’histiocytofibrome malin.
La majorité des cas se rencontre au squelette craniofacial, puis vient le fémur proximal.
L’atteinte de l’humérus, des os pelviens, du tibia et de l’omoplate a été signalée.
L’existence d’une douleur progressivement croissante, persistante malgré le repos, l’apparition d’une tuméfaction clinique, la constatation d’une extension radiologique des atteintes osseuses envers les parties molles suggèrent la possibilité d’une transformation maligne.
Cette transformation maligne de la DF est plus fréquente après irradiation.
Un cas d’ostéosarcome a été signalé après allongement osseux, selon la méthode d’Ilizarov, effectué pour un raccourcissement sur DF.
En général, le pronostic de ces sarcomes sur DF est mauvais.
Le dépistage précoce et un traitement approprié permettraient vraisemblablement de l’améliorer.
G – LABORATOIRE : Chez la plupart des patients atteints de DF, la calcémie et la phosphorémie sont normales.
La phosphatase alcaline sérique peut être augmentée, de façon plus ou moins proportionnelle à la sévérité de l’atteinte osseuse.
Cette élévation des phosphatases alcalines est moins marquée que lors d’une atteinte de topographie identique entrant dans le cadre d’une maladie de Paget.
L’hydroxyproline urinaire peut être augmentée.
La N-télopeptide urinaire, marqueur de la résorption collagénique osseuse, peut aussi être élevée selon Singer.
Chez les patients atteints du SMA, les profils hormonaux sont affectés selon l’atteinte de l’organe-cible de la maladie.
L’élévation des hormones de croissance, de la prolactine et de l’hormone thyroïdienne est plus souvent signalée que celle de la testostérone, des corticostéroïdes et de l’hormone parathyroïdienne.
Lorsqu’un rachitisme ou une ostéomalacie sont présents, on retrouve habituellement une hypophosphatémie et une hyperphosphaturie.
Il faut signaler que lorsqu’un rachitisme s’associe à la DF, on assiste généralement à une normalisation des données de laboratoire lorsqu’on traite la lésion osseuse.

Étude radiologique :
Dans la plupart des cas l’aspect radiologique est suffisamment caractéristique pour que la biopsie ne soit pas obligatoire.
A – ASPECT CLASSIQUE :
L’aspect classique en radiographie conventionnelle est celui d’une lésion lytique endomédullaire, diaphysaire ou métaphysaire.
Il existe un liseré de sclérose marginale, avec une résorption endostée (scalloping).
Le diamètre de l’os est généralement augmenté et son intérieur est fait d’une matrice ayant la densité d’un verre dépoli. L’aspect matriciel est celui d’une zone de radiotransparence évoquant un contenu fibreux kystique.
La densité matricielle augmente en fonction du nombre d’îlots de cartilage calcifié ou d’os néoformé que la lésion contient.
Habituellement, il s’agit d’une densité intermédiaire diffuse et relativement homogène, dite en « verre dépoli » (ground glass).
La résorption endostée est lente.
Elle amène progressivement à un amincissement de la corticale, avec apposition périostée progressive entraînant une augmentation du diamètre de l’os.
Au squelette craniofacial, les amas de condensations osseuses semblent plus fréquents. Les lésions contiennent parfois des calcifications arciformes traduisant une calcification progressive des nodules cartilagineux.
Ces aspects sont en fait variables sur les os longs, et bien plus encore sur les os plats.
B – AUTRES TECHNIQUES D’IMAGERIE :
Elles sont d’un intérêt modeste :
– la tomodensitométrie est cependant utile dans les lésions craniofaciales.
Elle permet de mieux définir l’étendue de la maladie ;
– l’imagerie par résonance magnétique nucléaire ne permet pas d’identifier un aspect spécifique, mais elle aide bien à apprécier l’extension des lésions ;
– la scintigraphie osseuse permet parfois de dépister les lésions mal visibles en radiographie conventionnelle, mais elle peut présenter des faux négatifs.
La fixation scintigraphique au gallium semble particulièrement utile.
L’existence de multiples lésions à distribution hémicorporelle est évocatrice du SMA.
C – SELON LA LOCALISATION :
Ces images ont des caractères particuliers selon la localisation des lésions :
– au fémur proximal, du fait du porte-à-faux de l’angle cervicodiaphysaire, il peut exister des fractures microscopiques qui entraînent à la longue une déformation progressive en varus : au maximum, l’extrémité supérieure du fémur est déformée en « crosse de berger » (shepherd’s crook).
Cette désaxation progressive peut toucher le fémur en entier, et même concerner le tibia.
Des fractures peuvent survenir, pouvant même conduire à la pseudarthrose ;
– au crâne, l’épaississement du diploé s’associe à des zones lytiques et à des plages d’opacités variables ;
– les côtes sont soufflées avec un espace médullaire dilaté ;
– au rachis, les atteintes osseuses sont rares.
Elles se révèlent par une altération de la trame osseuse pouvant entraîner douleurs et déformations du corps vertébral.
Chez l’enfant, il est possible de constater une cyphose dorsolombaire.
D – SELON L’ÂGE : L’image radiologique est aussi variable en fonction de l’âge. Chez le jeune enfant, il s’agit souvent d’une ostéolyse pure non spécifique.
La progression et la maturation de la lésion lui donnent par la suite les caractéristiques spécifiques de la maladie. Par ailleurs, les formes plus sévères (polyostotiques diffuses, SMA) sont plus florides dans leurs expressions radiographiques.
Les os porteurs, surtout le fémur et le tibia, présentent volontiers une désaxation progressive qui est en relation avec l’extension progressive de la DF au fil du temps, avec l’altération des propriétés mécaniques de l’os par la maladie, avec l’augmentation du poids corporel, et parfois avec la succession des fractures itératives.
Chez l’adulte, on assiste généralement à une stabilisation du processus dysplasique avec apparition d’un liseré d’ostéosclérose périphérique et une recalcification ou réossification de la zone lytique.
Anatomie pathologique :
Lorsque le tableau radioclinique n’est pas typique, une biopsie permet de confirmer le diagnostic.
Il est exceptionnel de traiter une dyplasie fibreuse par résection de tout un segment osseux ; c’est néanmoins parfois le cas pour certaines localisations comme les côtes.
De telles pièces anatomiques montrent un canal médullaire dilaté qui ne contient plus d’os spongieux mais un tissu fibreux ferme, élastique, de coloration habituellement jaune pâle, entouré de corticales amincies.
Ce remaniement fibreux d’une pièce osseuse normalement rigide entraîne un certain degré de plasticité qui explique bien les incurvations progressives du squelette que l’on constate volontiers sur les os porteurs (col du fémur, diaphyses du membre inférieur).
La DF est caractérisée histologiquement par la prolifération d’un tissu conjonctif fibreux associé à des travées d’os immature (non lamellaire) de taille et de forme très variables.
– Les cellules fusiformes du tissu fibreux sont souvent dilatées mais ne présentent aucune atypie.
Elles adoptent volontiers une disposition « storiforme ».
Les travées osseuses de la DF sont classiquement dépourvues d’un liseré périphérique d’ostéoblastes ; elles ont un aspect métaplasique semblant émerger du tissu fibreux environnant.
La DF peut aussi comporter des amas de macrophages spumeux, des cellules géantes multinucléées, un stroma myxoïde, quelques travées osseuses réactionnelles entourées d’un liseré d’ostéoblastes, ou encore des foyers de différenciation cartilagineuse.
Les localisations craniofaciales de la DF contiennent fréquemment des travées osseuses plus abondantes, plus épaisses, anastomosées entre elles.
– L’association d’une DF et d’un kyste anévrismal est un fait connu ; à l’intervention, on découvre au sein des plages fibreuses des cavités plus ou moins volumineuses, plus ou moins nombreuses, à contenu sanglant ; de tels foyers ne sont parfois dépistés qu’à l’examen microscopique.
– Certaines dysplasies fibreuses peuvent contenir un liquide clair séreux, occupant parfois la presque totalité de la zone radiologiquement lytique ; ces formes kystisées représentent probablement un mode d’involution histologique de la maladie.

Diagnostic différentiel : La majorité des cas de DF sont de diagnostic facile après un simple examen radioclinique ; cependant, certaines lésions fibreuses d’autre nature peuvent prêter à confusion :
– il en va ainsi dans certains cas de kystes osseux essentiels consolidés après une ou plusieurs fractures ;
– dans les chondromes, lorsqu’ils ne présentent aucune calcification intralésionnelle et peuvent prêter à discussion ;
– citons enfin le granulome éosinophile et mentionnons le cas très particulier de la dysplasie ostéofibreuse de Campanacci (fibrome ossifiant), affection rare pouvant comporter des zones rappelant la DA associées à des aspects rappelant l’adamantinome ; la similitude terminologique ne doit pas faire illusion : il s’agit de maladies différentes.

Évolution et pronostic : L’histoire naturelle de la DF peut se faire selon des scénarios très variables :
– les formes monostotiques dépistées dans l’enfance sont en général peu évolutives et restent toujours monostotiques ;
– les fractures itératives, fréquentes dans les formes les plus sévères de la maladie, peuvent entraîner un préjudice fonctionnel (douleur, raccourcissement, désaxations et courbures des membres pouvant aller en s’aggravant un peu plus à chaque nouvel épisode, ce qui plaide en faveur de leur traitement par ostéosynthèse).
Ces fractures consolident néanmoins dans des délais normaux ;
– à l’âge adulte, l’évolutivité de la maladie s’atténue parfois et les qualités biomécaniques de l’os sont susceptibles de s’améliorer ;
– la transformation maligne d’une localisation de DF a été signalée ci-dessus.
Les signes qui doivent faire évoquer cette éventualité sont la recrudescence des douleurs, l’augmentation de volume du membre, l’apparition d’une destruction corticale et a fortiori d’un envahissement des parties molles. Au moindre doute, une biopsie doit être rapidement réalisée.
Le pronostic de ces sarcomes sur DF est mauvais.
Nous avons vu ci-dessus les différents types anatomopathologiques de ces dégénérescences.
Le traitement des sarcomes sur DF est mal codifié mais il est logique, devant de tels cas, de proposer un schéma thérapeutique analogue à celui qui se pratique habituellement dans l’ostéosarcome : chimiothérapie encadrant un geste de résection-reconstruction chirurgicale.

Traitements :
A – TRAITEMENTS CHIRURGICAUX : Les interventions de type curetage-comblement des foyers dysplasiques sont classiques et ont été beaucoup pratiqués par le passé. On a actuellement tendance à les abandonner car, dans la majorité des cas, les greffons se résorbent et l’image dysplasique réapparaît.
Une ostéosynthèse, quel que soit son type, peut être proposée devant des lésions volumineuses fragilisant l’os, afin de prévenir une éventuelle fracture pathologique.
Ces ostéosynthèses préventives peuvent aussi être utilisées pour stopper l’évolution des déformations, qu’il s’agisse d’un coxa vara progressif ou d’une incurvation diaphysaire.
Si les déformations sont déjà franches, la simple ostéosynthèse ne suffit plus, il faut l’associer à une ostéotomie correctrice.
Guille et al suggèrent de réaligner le col fémoral, par ostéotomie sous-trochantérienne dès que le varus est proche de 90°.
Personnellement, nous pensons qu’il est préférable d’intervenir dès que l’angle cervicodiaphysaire devient inférieur à 120°, stade où la valgisation est de réalisation plus facile.
Dans les très grandes incurvations diaphysaires, il faut parfois s’orienter vers des ostéotomies multiples étagées, maintenues par un enclouage centromédullaire qu’il est souvent prudent de verrouiller.
En dehors des cas où l’on souhaite prévenir une fracture ou bien l’aggravation d’une courbure, les ostéosynthèses préventives ont aussi de l’intérêt à titre purement antalgique ; elles améliorent les douleurs causées par la trop grande plasticité des zones dysplasiques.
Les fractures sur DF sont soit de vraies fractures plus ou moins déplacées, soit de simples fissures de fatigue favorisées par les incurvations osseuses.
Il n’est guère souhaitable de les traiter orthopédiquement car ce choix risque d’entraîner une consolidation avec une petite majoration des déformations initiales, ce qui est l’amorce d’une nouvelle fracture.
Pour rompre ce cercle vicieux, il faut, à chaque fois que la fracture survient sur une incurvation, pratiquer une ostéosynthèse avec correction des désaxations.
La consolidation osseuse des fractures ou des ostéotomies sur DF se fait sans difficulté particulière et dans des délais normaux.
B – TRAITEMENTS NON CHIRURGICAUX : Les foyers de DF contiennent beaucoup d’ostéoclastes. Cette activité ostéoclastique élevée explique probablement les mécanismes d’extension de la maladie.
La disponibilité, depuis quelques années, de produits ayant une activité antiostéoclastique a donc tout naturellement conduit à l’idée de les utiliser.
Les bisphosphonates sont utilisés avec succès depuis une dizaine d’années dans le traitement de diverses maladies ostéolytiques dont la maladie de Paget.
Leur intérêt dans la DF reste à prouver, mais des essais sont en cours avec des résultats encourageants : leur action antalgique semble certaine, leur action de « recalcification » des foyers lytiques semble possible mais demande à être confirmée.
Les contentions externes (plâtre ou orthèse) peuvent être utiles dans un nombre de cas très limité, soit à titre antalgique, soit pour prévenir l’aggravation d’une déformation dans l’attente d’une intervention chirurgicale ou dans l’attente de l’efficacité d’un traitement médical par les bisphosphonates.

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