Chirurgie de la polyarthrite rhumatoïde

Chirurgie de la polyarthrite rhumatoïde
 

Polyarthrite Rhumatoïde: Fertilité et Grossesse
Polyarthrite Rhumatoïde: Fertilité et Grossesse

Cours de l’appareil locomoteur

La polyarthrite rhumatoïde (PR), d’étiologie inconnue, probablement dysimmunitaire, associe une atteinte articulaire spécifique à des manifestations viscérales non spécifiques et inconstantes.

La cible précise de l’auto-immunité n’est pas établie (membrane synoviale ou cartilage articulaire).

La prise en charge d’un patient atteint de PR ne se conçoit qu’au sein d’une équipe médicale pluridisciplinaire, comprenant au minimum le rhumatologue, le chirurgien orthopédiste et le médecin rééducateur.

Ce principe s’est progressivement imposé, conduisant à la création de structures médicochirurgicales exclusivement consacrées à la PR.

L’étroite participation du médecin traitant et une information du patient sont la clef de l’efficacité d’un tel système de prise en charge.

Le traitement chirurgical de la PR est progressivement devenu une véritable spécialité au sein de la chirurgie orthopédique.

Son actualité est dominée par l’arrivée à maturité des arthroplasties de l’épaule, du coude et de la cheville, maturité en sus des prothèses de hanche et de genou.

Dans le même temps, la chirurgie conservatrice et préventive a gardé toute sa place et affiné ses indications.

Ainsi, le chirurgien doit convaincre le rhumatologue et le médecin traitant de lui confier précocement, avant les destructions articulaires majeures, les patients atteints d’une PR, afin de ne pas obérer ou limiter le résultat fonctionnel de son geste opératoire.

Le chirurgien doit connaître les données actuelles pathogéniques et thérapeutiques sur cette maladie chronique et à ce jour incurable, même si une majorité de patients n’ont pas à bénéficier d’actes opératoires.

Seule est évoquée ici la PR de l’adulte, en excluant la forme juvénile.

Données générales sur la polyarthrite rhumatoïde :

Décrite pour la première fois en 1800 par Landré-Beauvais, la PR est le rhumatisme inflammatoire le plus fréquent, atteignant l’adulte jeune, plus fréquemment la femme que l’homme (sex-ratio entre 2 et 3) et débutant en général entre la quatrième et la sixième décennie.

Sa prévalence est variable selon les pays et un chiffre moyen de 0,5 à 1 % est généralement admis.

En France, l’incidence (taux de nouveaux cas survenant dans une population donnée sur une période de temps définie) est de 0,076‰en Anjou et de 0,088‰en Lorraine.

Plusieurs études témoignent d’une diminution récente de l’incidence de la PR.

A – ÉLÉMENTS DE PHYSIOPATHOLOGIE :

1- Initiation de la maladie :

Le début clinique est probablement précédé d’une phase totalement silencieuse caractérisée par la seule présence de facteurs rhumatoïdes ou d’anticorps antikératine.

Les concepts actuels font intervenir au début de la maladie une interaction entre des cellules dites présentatrices d’antigènes (macrophages, monocytes, cellules dendritiques) et des lymphocytes T CD4+.

Les mécanismes intimes de cette première activation cellulaire, et en particulier l’antigène déclenchant, restent inconnus.

La PR survient sur un terrain particulier.

La prédominance féminine de la maladie correspond probablement à un environnement hormonal favorable.

Le terrain génétique représente un élément de susceptibilité important.

L’association entre PR et gènes human leukocyte antigen (HLA) de classe II est bien démontrée : environ 80 à 85 % des malades atteints de PR sont porteurs des antigènes HLA DR1 ou DR4.

Malgré un risque relatif évalué à 9 conféré par ces allèles, la détermination du groupage HLA ne possède pas de valeur diagnostique.

Le rôle des agents infectieux, bactériens ou viraux est suspecté de longue date.

Mycobacterium tuberculosis, Mycoplasma arthritides, Escherichia coli, virus d’Epstein-Barr, parvovirus B19, rétrovirus, sont des responsables évoqués dans le déclenchement de la maladie articulaire.

Ils pourraient initier la maladie en raison de leur tropisme intrasynovial ou par des mécanismes de mimétisme moléculaire, certains antigènes bactériens ou viraux étant proches, dans leur structure, de certains antigènes articulaires.

2- Mécanismes de la destruction articulaire :

Les modifications les plus précoces de la membrane synoviale concernent la couche bordante des synoviocytes qui devient hyperplasique et le siège d’une importante angiogenèse.

Les cellules s’organisent et reproduisent l’aspect d’une structure lymphoïde.

Les lymphocytes T s’organisent en follicules autour de cellules présentatrices d’antigènes qui expriment à leur membrane de grandes quantités de molécules HLA.

Lymphocytes B et plasmocytes sont situés en périphérie de ces formations nodulaires, responsables d’une production locale d’autoanticorps.

Les macrophages entretiennent le processus auto-immun et participent activement à la production de cytokines.

Les polynucléaires dans le liquide synovial et les macrophages dans la membrane synoviale entretiennent la réaction inflammatoire par la production de nombreux médiateurs.

Les facteurs rhumatoïdes peuvent participer aux mécanismes lésionnels et sont présents dans 80 % des PR.

Les anticorps antikératine, antipérinucléaire ou anti-Sa sont moins fréquents mais plus spécifiques de la maladie.

Dans la PR, trois cytokines pro-inflammatoires (tumor necrosis factor [TNF]a, l’interleukine [IL]1 et l’IL2), sécrétées par les macrophages et les synoviocytes, agissent en synergie et en cascade et stimulent la synthèse hépatique des protéines de l’inflammation.

Localement, le TNFa et l’IL1 stimulent fortement la production de prostaglandines et de collagénases, participant aux mécanismes de destruction du cartilage.

Normalement, l’action de ces cytokines est régulée par la production d’antagonistes naturels produits par les synoviocytes.

D’autres cytokines, trouvées dans la membrane synoviale, favorisent l’angiogenèse et la prolifération cellulaire.

Certaines représentent une cible thérapeutique potentielle.

Ainsi, le TNFa peut être inhibé par un anticorps monoclonal ou par un récepteur soluble.

Les essais thérapeutiques en cours sont prometteurs. Les lésions irréversibles débutent à la jonction entre la membrane synoviale et la surface articulaire.

Activés sous l’influence des macrophages et des synoviocytes A, les synoviocytes B se multiplient, prenant l’aspect de cellules agressives produisant des enzymes dégradatives.

Ils expriment de forte quantité de molécules HLA à leur surface.

La destruction du cartilage serait consécutive à l’infiltration cellulaire et à la production de métalloprotéases (collagénase, stromélysine) sous l’action stimulatrice des cytokines.

3- Perturbations du métabolisme osseux :

Elles sont constantes, diffuses et précoces dans la PR. Les conséquences biomécaniques doivent être prises en compte dans tout geste opératoire ostéoarticulaire.

Elles résultent d’une augmentation à la fois de la formation et de la résorption osseuse.

Ainsi, dès la première année d’évolution d’une PR, il est constaté une perte de 2,5 à 5 % de la densité minérale vertébrale et fémorale proximale, évaluée par absorptiométrie diphotonique.

Ce phénomène est par le suite aggravé par la corticothérapie et/ou la ménopause.

La traduction radiologique n’est manifeste qu’au-delà d’une perte de 30 % du capital osseux, marquée par une raréfaction trabéculaire métaphysoépiphysaire et un amincissement des corticales.

Les conséquences pratiques sont multiples : augmentation du risque fracturaire après traumatisme ou peropératoire, fracture de fatigue (fibula, tibia distal, pourtour du foramen obturé, métatarses), déformations articulaires par tassement du spongieux épiphysométaphysaire.

Ces perturbations ont été particulièrement étudiées cliniquement et expérimentalement à la coxofémorale et au genou.

Ainsi, la rigidité du spongieux métaphysaire tibial est deux fois moindre dans la PR que dans l’os normal ou arthrosique.

En revanche, la réparation fracturaire, la fusion articulaire après arthrodèse et l’incorporation des autogreffes se font dans des délais normaux. Plus discutée est l’ostéo-intégration assurant la fixation secondaire des implants prothétiques.

En effet, l’augmentation du remodelage osseux pourrait apparaître comme un facteur limitant l’utilisation d’implants non cimentés dont les surfaces poreuses ne seraient que partiellement colonisées.

Elle ne se vérifie pas en pratique clinique.

Dans le même ordre d’idée, le risque de fracture diaphysaire proche de l’extrémité d’une tige prothétique endomédullaire est plus élevé dans la PR à la jonction de zones ayant un important différentiel de rigidité.

B – HÉTÉROGÉNÉITÉ DE LA POLYARTHRITE RHUMATOÏDE :

La PR se caractérise par une atteinte articulaire à prédominance acromélique, bilatérale et symétrique, responsable d’une destruction articulaire progressive à l’origine d’un handicap plus ou moins marqué. Son évolution est extrêmement hétérogène.

Elle touche l’ensemble des articulations, mais aussi les ténosynoviales tendineuses, particulièrement abondantes à la main et au pied.

1- Guérison spontanée :

La guérison spontanée ou la rémission prolongée sont possibles, surtout au début de la maladie, selon une fréquence mal établie.

La plupart des études menées en milieu rhumatologique hospitalier font état d’une rémission durable chez 10 à 15 % des patients ; d’autres montrent que seuls 25 % environ des patients qui répondaient aux critères diagnostiques de PR ont encore une maladie active 3 à 5 ans plus tard.

2- Détérioration articulaire :

Elle est observée chez la plupart des patients, avec une évolution progressive, alternant poussées et rémissions.

Les études prospectives de PR débutantes avec un suivi prolongé montrent que 8 à 40 % des patients ont des érosions radiologiques au niveau d’au moins une articulation dès la première année d’évolution, plus précocement sur les avant-pieds que sur les mains.

La quasi-totalité des PR érosives qui présentent des signes radiologiques dans les 2 premières années atteignent 50 % de leur score lésionnel maximal (érosions et pincements articulaires) après 5 ans d’évolution.

La détérioration articulaire reste croissante au cours de la maladie, mais c’est lors des deux à trois premières années que le taux de progression des lésions est le plus important.

3- Qualité de vie :

La qualité de vie des patients est profondément altérée, mais son évaluation est difficile car dépendante de nombreux facteurs : milieu socioculturel, possibilités et réponses thérapeutiques…

La plupart des questionnaires de qualité de vie, dont le plus courant est le health assessment questionary (HAQ), explore de façon subjective le handicap fonctionnel.

Les premières années de la maladie sont souvent marquées par une détérioration initiale suivie d’une amélioration modérée des scores, traduisant le bénéfice des traitements.

Ils s’aggravent ensuite de façon progressive au-delà de la dixième année.

Un HAQ supérieur à 2, témoin de nombreuses difficultés dans les capacités à réaliser les activités du quotidien, est observé chez 50 % des rhumatisants après 6 ans d’évolution.

Le retentissement sur l’activité professionnelle est important : 44 % des patients actifs sont en arrêt de travail dès les deux premières années de la maladie et de manière définitive pour 20 %.

4- Pronostic général :

Toutes les études s’accordent à reconnaître une diminution de l’espérance de vie.

Les causes directes du décès apparaissent similaires à celles de la population générale, les maladies cardiovasculaires venant au premier rang.

La fréquence des décès par infections, maladies rénales, respiratoires et digestives est discrètement plus élevée.

La toxicité des traitements ne peut être tenue pour responsable que pour moins de 1 % des décès.

La mortalité est corrélée à la sévérité de la maladie et à la présence de manifestations extra-articulaires.

Ainsi, un groupe de PR sévères définies par plus de 20 articulations touchées et par une réduction de plus de 80 % des activités de la vie quotidienne, a un taux de survie de 50 % à 5 ans.

C – PRINCIPES DU TRAITEMENT MÉDICAL :

1- Au stade de PR débutante :

Le diagnostic de PR est avant tout clinique, éventuellement consolidé par la positivité des facteurs rhumatoïdes ou des anticorps antikératine, qui peuvent être absents au stade précoce.

La présence de lésions érosives à l’examen radiographique est un élément important du diagnostic.

Celui-ci étant posé, il importe ensuite d’évaluer le pronostic pour aider aux premiers choix thérapeutiques.

Les moyens d’évaluation du pronostic ne sont pas encore parfaitement établis, mais il semble que certains facteurs soient associés à une plus grande sévérité de la maladie : nombre initial d’arthrites, importance et persistance du syndrome inflammatoire, précocité et titre du facteur rhumatoïde, précocité d’apparition des premières lésions osseuses, présence d’un terrain génétique défini par la présence de HLA DR4.

Le traitement initial repose sur l’association d’un traitement antiinflammatoire symptomatique, stéroïdien ou non stéroïdien, et d’une médication de fond. Sa mise en route rapide permet de réduire la sévérité de la maladie, en prévenant les lésions de destruction articulaire.

Le choix du traitement de fond se base sur la sévérité potentielle de la maladie, l’âge, les pathologies associées et sur le rapport bénéfice/risque iatrogène.

Ainsi, une PR jugée potentiellement bénigne relève d’un traitement symptomatique par un anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) associé à l’hydroxychloroquine.

Une réévaluation clinique et biologique après 4 à 6 mois doit permettre d’adapter la prescription, en poursuivant les antipaludéens de synthèse, ou en optant pour un traitement plus actif : sels d’or injectables, sulfasalazine, D-pénicillamine ou tiopronine.

Une PR jugée sévère justifie une prescription plus incisive pour contrôler le plus rapidement possible l’inflammation articulaire.

Plusieurs arguments font du méthotrexate un bon candidat pour ce type de PR : efficacité dans le contrôle des manifestations inflammatoires articulaires, capacité à freiner l’évolution et l’apparition de nouvelles érosions osseuses.

Il s’avère actuellement posséder le meilleur taux de maintien thérapeutique avec des délais d’efficacité les plus brefs.

Enfin, le méthotrexate permet des associations thérapeutiques plus efficaces que la monothérapie.

Un contrôle insuffisant d’une PR après 3 mois de méthotrexate peut justifier une association corticothérapiesulfasalazine, voire dans certaines situations particulières avec la ciclosporine.

Ce schéma doit tenir compte de l’âge du patient et des pathologies associées qui peuvent limiter le choix du prescripteur, mais l’objectif est toujours de rechercher l’état de rémission, seule possibilité pour prévenir la destruction articulaire.

De nouveaux traitements : léflunomide (Aravat) et traitements anti-TNF (Enbrelt, Rémicadet) semblent ajouter une note importante d’espoir au contrôle de la maladie.

Au stade de début, la chirurgie n’a aucune indication.

La biopsie synoviale ne possède pas d’intérêt car une synovite récente ne possède aucune caractéristique qui puisse permettre à elle seule le diagnostic.

Elle peut cependant être indiquée en cas d’atteinte monoou oligoarticulaire pour éliminer une pathologie septique ou granulomateuse.

2- Au stade de PR avérée et active :

Si la PR devient une maladie chronique, active malgré un traitement médical bien conduit, et destructrice, la prise en charge relève d’une équipe pluridisciplinaire en plus du médecin généraliste et du rhumatologue.

Elle comporte à des degrés divers le médecin rééducateur, l’ergothérapeute, le podologue, l’orthopédiste, le kinésithérapeute, l’assistante sociale et le chirurgien orthopédiste.

L’information du patient est une étape importante.

La recherche d’un traitement de fond actif reste le souci prioritaire.

Les gestes locaux doivent être envisagés pour les atteintes qui restent actives malgré le traitement médicamenteux : orthèses, infiltrations d’un corticoïde, synoviorthèses isotopiques.

La chirurgie est, à ce stade, soit préventive en cas d’échec des traitements locaux, soit réparatrice en cas de détérioration articulaire trop avancée pour espérer un bon résultat des gestes locaux.

L’objectif de cette prise en charge globale est de conserver la fonction articulaire, d’éviter les déformations, de maintenir l’autonomie fonctionnelle et de favoriser la réinsertion socioprofessionnelle.

Elle nécessite une coordination et une concertation entre les différents intervenants.

Une PR en grande poussée polyarticulaire, non encore stabilisée par le traitement de fond, ne peut en aucun cas constituer une indication chirurgicale.

La chirurgie est un complément majeur du traitement médical pour protéger une articulation qui reste inflammatoire ou pour remplacer une articulation détruite.

Les patients atteints de PR doivent être considérés comme immunodéprimés, que ce soit par la maladie elle-même ou par les traitements qu’ils reçoivent.

La recherche de foyers infectieux potentiels avant toute mise de prothèse doit être réalisée avec minutie.

Les traitements symptomatiques (AINS, cortisone) ne doivent pas être arrêtés pour ne pas exposer à une poussée.

La plupart des traitements de fond n’ont aucune raison d’être interrompus au moment de l’intervention chirurgicale.

La poursuite du méthotrexate en pré- et postopératoire n’expose pas le patient à un risque infectieux plus important.

En revanche, les traitements anti-TNF augmentent le risque d’infection sévère.

L’Enbrelt doit être interrompu au moins 1 semaine avant l’acte chirurgical et n’est repris qu’après cicatrisation complète.

Pour les patients traités par Rémicadet, l’intervention chirurgicale doit être programmée au moins 1 mois après la dernière perfusion.

3- Au stade de PR séquellaire :

Après de nombreuses années de maladie, la PR peut devenir inactive, qu’il s’agisse de son évolution spontanée ou de l’action des thérapeutiques.

Le traitement de fond n’est parfois plus utile, mais les traitements symptomatiques de la douleur restent nécessaires.

La chirurgie, associée à la rééducation, permet de restaurer certaines activités indispensables de la vie quotidienne.

À ce stade, le chirurgien doit être vigilant vis-à-vis des patients ayant reçu une corticothérapie prolongée.

La qualité de la cicatrisation est parfois médiocre.

L’os est souvent déminéralisé et un traitement de l’ostéoporose est alors nécessaire.

Tous les gestes chirurgicaux nécessitent une réadaptation fonctionnelle, si possible en milieu spécialisé.

Gestes opératoires :

La chirurgie de la PR répond à deux principes différents :

– la chirurgie conservatrice consiste à exiser le pannus synovial ou ténosynovial et à tenter de stopper la destruction articulaire.

Elle est indiquée devant une synovite ou une ténosynovite mal contrôlée par le traitement général ;

– la chirurgie non conservatrice vise à exciser le tissu synovial, le cartilage détruit, et soit à arthrodéser l’interligne, soit à le remplacer par une arthroplastie.

Elle n’est de mise que pour des destructions articulaires, témoins de la non-maîtrise globale de la maladie et de l’échec du traitement médicamenteux.

A – MEMBRE THORACIQUE :

1- Épaule rhumatoïde :

Au cours de l’évolution de la PR, l’épaule est très fréquemment atteinte, avec des proportions variant de 60 à 90 %.

Les lésions sont bilatérales plus de huit fois sur dix, et polymorphes.

La synovite rhumatoïde peut intéresser la bourse séreuse sousacromiodeltoïdienne, l’articulation glénohumérale, détruire les cartilages céphaliques, glénoïdiens et/ou léser la coiffe des rotateurs.

Plusieurs classifications ont été proposées.

Neer a décrit trois types tenant compte de la destruction ostéoarticulaire et l’état de la coiffe.

De même, Levigne et Walch décrivent une forme « montante », la plus fréquente, par incompétence de la coiffe des rotateurs, une forme « centrée » proche de l’omarthrose et une forme « destructrice ».

L’imagerie médicale apporte des renseignements indispensables à la conduite thérapeutique.

La tomodensitométrie évalue le capital osseux disponible, apprécie le type d’usure humérale et glénoïdienne, calcule l’orientation des surfaces articulaires et appréhende les propriétés mécaniques.

L’arthrographie réalisée dans le même temps évalue l’intégrité des tendons de la coiffe des rotateurs et leur qualité trophique.

L’imagerie par résonance magnétique apprécie l’importance de la synovite articulaire, mais également la trophicité des muscles et des tendons de la coiffe des rotateurs.

L’échographie peut également donner des éléments intéressants sur l’état de la bourse sous-acromiale et des tendons de la coiffe des rotateurs.

Pour l’épaule rhumatoïde, la chirurgie se résume à la bursectomie sous-acromiodeltoïdienne, l’arthrodèse et l’arthroplastie.

* Bursectomie :

La bourse séreuse sous-acromiodeltoïdienne est un siège classique de synovite rhumatoïde.

La bursectomie sous-acromiodeltoïdienne est réalisable par chirurgie conventionnelle ou par arthroscopie.

Les résultats rapportés par Miehlke ont été particulièrement significatifs sur la douleur et la fonction.

Toutefois, aucun effet préventif sur la détérioration articulaire et de la coiffe des rotateurs n’a pu être mis en évidence.

L’arthrite acromioclaviculaire est parfois responsable d’un conflit sous-acromial avec le tendon du susépineux : une résection de l’extrémité externe de la clavicule par chirurgie conventionnelle ou arthroscopique est proposée en complément de la bursectomie.

* Arthrodèse de l’épaule :

L’arthrodèse glénohumérale n’a pas de particularité technique dans la PR, mais se doit de tenir compte de l’ostéoporose, source d’une tenue aléatoire de l’ostéosynthèse, et de la difficulté d’un affrontement céphaloglénoïdien lié à la perte du capital osseux scapulaire.

La position de fusion recommandée par Rybka est une abduction diaphysaire humérale de 55° avec une projection antérieure de 25° en rotation interne.

De plus, il conseille une immobilisation par plâtre thoracobrachial pendant 9 semaines, particulièrement difficile à supporter dans le contexte d’atteinte pluriarticulaire de la PR.

Malgré cette mesure contraignante, Rybka fait état de 10 % de pseudarthrodèse.

* Arthroplastie :

L’arthroplastie glénohumérale dans le cadre de la PR est actuellement codifiée.

Les prothèses contraintes ont été abandonnées en raison du nombre élevé de complications.

Les prothèses semicontraintes sont d’indication limitée et réservées aux lésions articulaires avec rupture des muscles périarticulaires.

Les prothèses non contraintes, sous réserve d’une coiffe des rotateurs fonctionnelle, sont les prothèses les plus utilisées, celle de Neer étant la référence.

La technique opératoire n’a pas de spécificité en ce qui concerne l’abord chirurgical et l’implant huméral.

Celui-ci est posé en augmentant la rétroversion physiologique céphalique.

L’utilisation de ciment est recommandée.

L’ancrage de la glène prothétique reste un problème technique difficile dans le contexte de la PR : la surface articulaire est éculée, l’os sous-chondral scléreux et mince.

Les seules zones mécaniquement fiables sont la partie antérosupérieure dans la direction de la coracoïde et inférieure vers le pilier de la scapula.

Dans les formes destructrices, il est parfois impossible de fixer la glène prothétique et force est de ne placer que l’implant huméral face à une glène « resurfacée ».

L’état anatomique de la coiffe des rotateurs est un élément fondamental du résultat fonctionnel de la future arthroplastie.

De nombreuses séries ont souligné le rôle antalgique et le gain de mobilité des arthroplasties confirmées par notre propre expérience.

Des études récentes, avec un long recul, ont souligné les problèmes mécaniques tardifs descellements prothétiques, souvent d’ailleurs uniquement de traduction radiologique ; subluxation supérieure de la tête par rupture secondaire de la coiffe et marquent les limites actuelles de cette chirurgie.

Les difficultés techniques posées par les révisions prothétiques ne sont actuellement que partiellement maîtrisées.

2- Coude rhumatoïde :

Dans la PR, le coude est atteint dans à peu près 50 % des cas.

La perte de fonction importante résulte autant de la destruction articulaire que de la distension ligamentaire.

La douleur est souvent le symptôme prédominant lié à la synovite articulaire.

Elle se traduit habituellement par un épanchement et par un déficit d’extension de 10 à 20°.

Avec l’évolution des lésions articulaires, la douleur est présente tout au long de l’arc de mobilité.

En raison de la perte du capital osseux et de la destruction ligamentaire, le coude acquiert une laxité frontale spécifique de l’arthropathie rhumatismale.

La compression du nerf ulnaire est une conséquence de la synovite ou de la destruction articulaire et de la laxité.

Un bilan radiographique conventionnel suffit le plus souvent à évaluer l’atteinte articulaire du coude.

La classification spécifique établie par Morrey est conçue pour guider le choix thérapeutique.

* Techniques d’indications limitées :

La bursectomie olécranienne peut être réalisée de manière conventionnelle ou sous arthroscopie.

L’arthroplastie modelante avec interposition de fascia lata ou de matériaux divers a des indications réduites d’autant qu’elle compromet le résultat ultérieur d’une prothèse.

L’application d’un fixateur externe en distraction semble améliorer les résultats en autorisant une mobilisation immédiate.

L’arthrodèse huméro-ulnaire ne garde qu’une place très limitée ; elle nécessite un greffon iliaque et une ostéosynthèse stable.

* Synovectomie :

La synovectomie huméro-radio-ulnaire subtotale par seule voie latérale externe, contrôlant à la fois le compartiment antérieur et postérieur, reste la méthode la plus employée.

Certains auteurs préfèrent utiliser deux voies d’abord, latérale et médiale.

À la synovectomie, s’associe généralement la résection de la tête radiale, en soulignant le risque de déstabilisation : la mobilité n’est améliorée que dans moins de la moitié des cas, mais l’indolence est obtenue neuf fois sur dix.

Cependant, les résultats semblent se détériorer avec le temps et la récidive de la synovite est fréquente après 5 ans.

L’échec de la synovectomie ne compromet cependant pas le résultat d’une future arthroplastie.

La synovectomie arthroscopique a été proposée dans l’espoir d’une récupération plus rapide.

Si le résultat immédiat reste très satisfaisant, il se détériore rapidement avec le temps.

De plus, il existe un risque de complications neurologiques. La synovectomie est rarement complète et la résection de la tête radiale reste difficile sous arthroscopie.

* Prothèse totale :

La PR représente la meilleure indication des prothèses totales de coude.

Deux types d’implants uniquement huméro-ulnaires sont actuellement disponibles :

– non contraints : Souter, Kudo, Ewald, Guepar… ;

– semi-contraints : Coonrad-Morrey et GSB III. Les prothèses non contraintes comportent des implants de resurfaçage mais n’offrent que très peu de stabilité intrinsèque.

Une capsule intacte, des ligaments collatéraux parfaitement tendus et un tonus musculaire suffisant sont donc essentiels pour assurer la stabilité de l’implant.

Les prothèses semi-contraintes offrent un champ d’indications plus large, autorisant notamment leur utilisation dans les formes plus évoluées et grâce à des implants de taille variable.

Les séries publiées sont plus rares mais ont cependant un long recul.

La courbe de survie de la prothèse de Coonrad-Morrey est identique à celle des prothèses totales de hanche posées pendant la même période soit 92,4 % à 10 ans.

De même, le taux de survie d’une série de 36 prothèses GSB III était de 94,7 % à 10 ans ; après 15 ans, 83 % des implants étaient encore en place.

La prothèse du coude reste une chirurgie spécialisée à réaliser dans des services de référence car les difficultés techniques sont parfois majeures.

3- Poignet rhumatoïde :

Le poignet est constamment atteint dans la PR : sa richesse en synoviale articulaire et en ténosynoviale tendineuse dorsale et palmaire explique le caractère polymorphe et diffus de cette atteinte.

Elle débute le plus souvent dans la gaine du tendon de l’extenseur ulnaire du carpe (EUC), du complexe ligamentaire postéromédial et de l’articulation radio-ulnaire distale (RUD).

Avec les destructions progressives de ces structures, la colonne médiale du carpe se subluxe en avant, entraînant une rotation en supination du carpe, et une dislocation de la RUD, avec déplacement dorsal de la tête de l’ulna.

L’EUC se luxe progressivement en palmaire, devient fléchisseur et contribue à entraîner la partie ulnaire du carpe en direction palmaire.

Les différents interlignes médio-et radiocarpiens sont le siège d’une arthrite destructrice et d’une dislocalisation intraet radiocarpienne irréductible et irréversible limitant la mobilité.

Les altérations ostéoarticulaires du poignet aboutissent à des désaxations qui se répercutent inéluctablement sur les chaînes digitales.

Cette notion est fondamentale dans la genèse des déformations de la main rhumatoïde et souligne la prééminence d’un geste opératoire radiocarpien.

Le « poignet rhumatoïde » se caractérise par l’association de lésions articulaires (radio-, médio- et ulnocarpiennes) et une ténosynovite du système extenseur.

Le système extenseur extrinsèque, dévié dans son trajet, induit la déviation digitale et risque la rupture spontanée sur un relief agressif.

Divers gestes opératoires sont proposés en fonction de l’atteinte articulaire, ténosynoviale, et la réductibilité des désaxations ostéoarticulaires.

L’examen clinique et un bilan radiographique conventionnel suffisent à décider de l’opportunité de ces gestes.

* Chirurgie conservatrice :

La chirurgie conservatrice du poignet rhumatoïde associe une ténosynovectomie des extenseurs, une synovectomie de la RUD, à la résection de la tête de l’ulna. Le moignon de l’ulna est stabilisé en repositionnant le tendon de l’EUC grâce à une plastie de la gaine détruite.

L’arthrodèse de la tête de l’ulna au radius, associée à la résection sus-jacente de 5 mm de l’ulna, créant une néoarticulation (intervention de Kapandji-Sauve), est l’autre option technique.

La synovectomie radiocarpienne isolée est controversée. Si elle soulage le patient, elle entraîne parfois une diminution de la mobilité et ne stoppe pas l’évolution de la maladie.

Elle reste difficile à réaliser en totalité en raison des nombreux compartiments articulaires.

La synovectomie peut être réalisée par chirurgie conventionnelle ou par arthroscopie.

Un transfert du tendon du long extenseur radial du carpe (deuxième radial) sur le tendon de l’EUC corrige ou prévient l’inclinaison radiale du carpe dans les stades débutants.

* Réparations des ruptures tendineuses :

L’usure progressive sur un relief osseux agressif représente la cause habituelle des ruptures des tendons extenseurs : tête de l’ulna pour l’extenseur propre du cinquième, tubercule de Lister pour le tendon extenseur du pouce.

Il existe parfois une atteinte directe des tendons par la ténosynoviale hypertrophique, aboutissant à la formation de nodule intratendineux dissociant les fibres tendineuses.

La rupture tendineuse se traduit par une perte soudaine de l’extension de la MCP, pratiquement sans douleur.

Les transferts tendineux représentent la méthode de choix pour restaurer la fonction d’extension.

La suture terminoterminale est très aléatoire car elle s’adresse à un tendon pathologique.

Devant une rupture du long extenseur du pouce, le transfert de l’extenseur propre de l’index restaure la rétropulsion.

Pour la rupture d’un seul tendon extenseur d’un doigt long, la suture du moignon distal du tendon rompu sur le tendon sain adjacent réanime la fonction.

Lorsque la rupture intéresse plusieurs tendons, sont associés suture adjacente et transfert tendineux.

Ainsi, pour une rupture de quatre tendons extenseurs, le fléchisseur superficiel du troisième ou du quatrième est utilisé pour réanimer le quatrième et le cinquième, et une suture adjacente entre extenseur propre du deuxième et du troisième est associée.

En cas de rupture de l’ensemble de l’appareil extenseur, deux fléchisseurs superficiels sont nécessaires pour restaurer l’extension des doigts.

* Arthrodèses :

La progression de l’arthrite rhumatoïde et des destructions articulaires suit, pour les interlignes du carpe, une chronologie variable, d’où la possibilité d’atteintes provisoirement focalisées pour lesquelles sont proposées des arthrodèses partielles.

Les arthrodèses partielles intracarpiennes intéressent préférentiellement l’interligne radio-ulnaire.

Elles stabilisent le poignet tout en conservant un secteur minimal de mobilité dans la médiocarpienne.

L’arthrodèse radio-ulnaire est proposée chaque fois que le poignet présente une instabilité radiocarpienne avec bascule palmaire et translation ulnaire du semi-lunaire sans atteinte majeure des autres interlignes carpiens.

L’interligne médiocarpien doit être de bonne qualité, notamment le pôle proximal du grand os.

Le semi-lunaire est arthrodésé en situation physiologique sous le radius. Une greffe n’est pas nécessaire, mais l’avivement articulaire est soigneux.

L’arthrodèse est fixée par broche ou agrafe.

L’amplitude en flexion-extension est en moyenne d’une cinquantaine de degrés et celle des inclinaisons latérales d’une vingtaine de degrés.

La force de serrage est équivalente à celle obtenue avec une arthrodèse totale du poignet.

Cependant, la plupart des poignets partiellement arthrodésés continuent de se dégrader avec le temps : le grand os glisse lentement sous le semilunaire en direction cubitale et palmaire.

L’arthrodèse totale assure une stabilisation définitive mais au détriment de la mobilité radiocarpienne tout en prévenant les déviations digitales.

Elle doit être fixée en position neutre ou en légère flexion palmaire avec une discrète inclinaison ulnaire.

Aucune greffe n’est en général nécessaire.

L’avivement des différentes surfaces associées à la tendance spontanée à la fusion et une ostéosynthèse simple (agrafe de petite taille, clou de Rush) assurent le succès de l’arthrodèse.

* Arthroplasties :

L’arthroplastie-interposition avec résection modelante des extrémités radiocarpiennes a été abandonnée.

L’arthroplastie prothétique du poignet représente une alternative à l’arthrodèse totale du poignet.

Elle comporte deux pièces qui se fixent l’une dans le radius et l’autre dans les métacarpiens.

Elle assure l’indolence dans la plupart des cas et restaure un secteur de mobilité de l’ordre de 60° en moyenne.

Mais le taux de complications reste élevé, aboutissant à des reprises chirurgicales souvent complexes.

En concurrence directe avec l’arthrodèse radiocarpienne, elle n’est pratiquée que par de rares équipes.

4- Main et pouce rhumatoïdes :

Outre le poignet, les manifestations précoces de la PR sont le plus souvent localisées aux doigts longs et au pouce.

Elles comportent arthrites métacarpophalangiennes, interphalangiennes et ténosynovites des tendons intrinsèques.

Le rôle initiateur et aggravant des déformations digitales par l’arthrite radiocarpienne a déjà été souligné.

* Système fléchisseur :

Les tendons fléchisseurs peuvent être le siège d’une ténosynovite inflammatoire et/ou nodulaire comprimant le nerf médian au canal carpien et/ou responsables d’une pathologie propre.

Les nodules intratendineux provoquent des phénomènes de ressaut ou de blocage, avec limitation de la flexion ou de l’extension.

Ces lésions aboutissent parfois à des ruptures tendineuses.

La ténosynovectomie est pratiquée par voie palmaire pour chacune des colonnes digitales atteintes, avec neurolyse du médian le cas échéant.

En cas de rupture tendineuse, la suture étant impossible, il est fait appel à des transferts tendineux (fléchisseur commun superficiel, brachioradialis, extenseur propre de l’index) ou à une greffe tendineuse (long palmaire, plantaire grêle ou extenseur du deuxième orteil).

Seule la rupture du tendon du long fléchisseur du pouce est traitée par arthrodèse interphalangienne.

* Déformations des doigts longs :

Les déformations des doigts longs, souvent au premier plan du tableau clinique, sont de pathologie complexe.

L’articulation métacarpophalangienne (MCP), intrinsèquement moins stable qu’une articulation interphalangienne proximale (IPP), est plus vulnérable aux forces de désaxation.

La déformation en « coup de vent » ulnaire est liée à la synovite des MCP, l’action prépondérante des muscles intrinsèques du côté ulnaire, et à une désaxation du poignet en inclinaison radiale.

Les tendons extenseurs se déplacent progressivement dans les gouttières intermétacarpiennes ulnaires, perdent leur fonction, et ne peuvent plus s’opposer à l’action prépondérante des fléchisseurs, ce qui entraîne une subluxation MCP palmaire.

Le pannus synovial érode et détruit les têtes métacarpiennes, fixant les déformations.

La synovectomie des MCP s’adresse aux synovites douloureuses avec modifications ostéoarticulaires minimes et légères déformations des doigts.

Des gestes de reconstruction des parties molles rééquilibrage des tendons extrinsèques, libération ou transfert des intrinsèques sont associés en cas de désaxation des doigts en présence de déformations réductibles. Dans les stades plus avancés, une arthroplastie des MCP est envisagée.

Les arthroplasties métalliques des doigts et notamment des MCP sont grevées d’un taux élevé de complications.

Les implants en silicone type Swanson représentent une solution efficace sur la douleur, reproductible, stable avec le temps.

C’est l’intervention de choix sur les MCP, malgré la possibilité de complications potentielles (infections, ruptures de l’implant, récidives de la désaxation ulnaire, luxations).

La mobilité active moyenne est de 30 à 40°.

La déformation en « col de cygne » associe une hyperextension de P2 à une flexion de P3 ; elle devient progressivement irréductible par subluxation palmaire des MCP et rupture de la plaque palmaire.

Elle est fonctionnellement gênante car compromet l’enroulement des doigts et la prise digitopalmaire.

Sa correction est dépendante du stade et de sa pathogénie.

La ténodèse du fléchisseur superficiel, combinée à une dermatodèse, s’adresse aux déformations réductibles sans lésions ostéoarticulaires.

En cas de rétraction des muscles intrinsèques du côté ulnaire, la flexion de l’IPP ne se réduit pas lors de l’extension de la MCP avec déviation radiale (test de Littler-Bunnel positif).

Devant ce type de lésion, la section des intrinsèques est associée à une arthrodèse de l’interphalangienne distale (IPD).

Enfin, devant une déformation fixée ou une destruction articulaire, l’arthrodèse de l’IPP stabilise définitivement l’articulation.

Dans la déformation en « boutonnière », la synovite entraîne une flexion de l’IPP et une distension de la bandelette médiane de l’extenseur.

Il s’ensuit une protrusion dorsale de l’IPP entre les deux bandelettes latérales de l’extenseur qui glissent en palmaire, entraînant progressivement l’hyperextension de l’IPD.

La technique chirurgicale dépend également de la gravité des lésions.

Lorsque le flessum de l’IPP est réductible passivement, un raccourcissement de l’appareil extenseur est proposé.

Si le flessum ne se réduit qu’incomplètement, la prescription d’orthèse dynamique peut permettre de retrouver une extension active du doigt.

En cas d’irréductibilité du flessum, une capsulotomie palmaire est effectuée dans le même temps que la reconstruction de l’appareil extenseur.

Enfin, en cas de destruction articulaire, une arthrodèse ou une arthroplastie sont proposées.

L’arthrodèse est préférée sur l’index et le majeur pour assurer leur stabilité lors de la prise pollicidigitale, alors que la mobilité est privilégiée grâce à une prothèse de Swanson pour l’annulaire et l’auriculaire.

Les articulations IPD ne sont que rarement atteintes dans la PR typique, sauf dans les formes mutilantes.

La déformation en « maillet » est secondaire à la rupture de l’insertion distale du tendon extenseur qui entraîne une chute de P3.

Lorsque l’attitude vicieuse devient fixée et douloureuse, l’arthrodèse de cette articulation est la technique de choix.

* Pouce rhumatoïde :

Son atteinte dans la PR répond à une pathogénie non univoque : arthrites des articulations interphalangiennes (IP) et du complexe trapézométacarpien, atteinte tendineuse extrinsèque.

Elle provoque deux types de déformation.

La déformation de type « boutonnière » ou en « Z » est fréquente et typique.

L’insuffisance fonctionnelle du court extenseur du pouce induit la flexion de la première phalange, ce qui réduit la force du long fléchisseur et augmente la tension du long extenseur.

Ce flessum métacarpophalangien est d’abord réductible en l’absence de lésion ostéoarticulaire.

Des mesures de protection articulaire, suivies de la réalisation d’une synovectomie associée à un geste de réaxation-stabilisation sont efficaces.

En cas de destruction de l’IP, celle-ci est arthrodésée.

Lorsque le flessum métacarpophalangien devient irréductible par destruction ostéoarticulaire, une arthrodèse métacarpophalangienne est indiquée, associée ou non à une arthrodèse interphalangienne.

L’alternative est une arthroplastie de la MCP par implant en silicone, associée à une arthrodèse de l’IP.

Le traitement d’une déformation de type « col de cygne » ou « pouce adductus » est nettement plus difficile.

Elle résulte de la subluxation et de la destruction de l’articulation trapézométacarpienne, entraînant une adduction du premier métacarpien, une hyperextension-abduction de la MCP et une flexion de l’IP.

L’arthrodèse trapézométacarpienne n’a pas d’indication dans la PR du fait de l’atteinte des autres articulations du pouce et du poignet.

Les autres possibilités chirurgicales sont la trapézectomie partielle ou totale avec interposition tendineuse, la stabilisation-interposition par implant et la prothèse totale.

Après trapézectomie avec interposition tendineuse et stabilisation ligamentaire, il existe un risque de conflit entre la base du premier métacarpien et le radius, en raison de la destruction progressive du scaphoïde.

Le pincement de l’interligne scaphotrapézien a conduit d’autres auteurs à s’orienter vers un implant condylien remplaçant la base du premier métacarpien, associé à un remodelage de la surface de contact avec le trapèze.

La stabilisation est assurée par des plasties tendineuses utilisant le tendon du fléchisseur radial du carpe, le tendon du long abducteur du pouce ou le tendon du long palmaire.

Enfin, l’implantation d’une prothèse totale métallique trapézométacarpienne dépend des possibilités de fixation dans le trapèze ou dans un bloc carpien fusionné.

Une MCP détruite est arthrodésée dans le même temps.

 

B – MEMBRE PELVIEN :

Au membre inférieur, la fréquence des arthrites algiques rhumatoïdes augmente de proximal en distal, avec 20 % d’atteinte coxofémorale, 55 % d’atteinte fémoro-tibio-patellaire et 90 % d’atteinte du pied.

1- Coxite rhumatoïde :

L’apparition d’une coxite algique et enraidissante est une étape évolutive majeure dans la PR car la bilatéralité lésionnelle et l’inefficacité relative des traitements conservateurs vont rapidement rendre difficile la marche, et ce d’autant qu’existe des lésions distales.

En effet , la coxite est rarement inaugurale et suit les atteintes rhumatoïdes des orteils et de l’ avant -pied. Sa symptomatologie est dominée par la douleur.

La raideur et/ou les atteintes vicieuses n’ont pas de spécificité.

Les prothèses totales de hanche (PTH) apportent une solution fiable et durable.

* Caractéristiques anatomiques :

Les perturbations du métabolisme osseux ne sont pas spécifiques à la hanche, mais c’est là qu’ elles ont le plus de conséquences biomécaniques et anatomiques.

L’accélération du mécanisme de résorption- formation touche le spongieux métaphysoépiphysaire et les corticales.

Il en découle un amincissement des corticales proximales et une ostéoporose trochantérienne et acétabulaire.

La tendance à la protrusion acétabulaire est spécifique du modelé dégénératif de la coxite rhumatoïde.

L’arrière -fond acétabulaire reste complet mais convexe dans le petit bassin ; la tête se déforme en parallèle , impliquant une quasi-ankylose articulaire qui rend difficile la luxation coxofémorale lors de l’arthroplastie.

En dehors de la PR juvénile , la protrusion acétabulaire majeure est actuellement rare , du fait d’une chirurgie plus précoce.

La radiographie conventionnelle est suffisante pour poser l’indication opératoire lorsque apparaît un pincement de l’interligne.

* Mesures préopératoires :

L’éradication des foyers infectieux fait partie des mesures préopératoires incontournables avant toute arthroplastie.

Dans le cadre de la PR, les lésions ulcératives distales dues aux déformations des pieds doivent faire l’ objet de soins préalables rigoureux.

Le contrôle et le remplacement des pertes sanguines sont sous la responsabilité de l’équipe d’anesthésistes.

Un taux d’hémoglobine de 10 g paraît suffisant pour éviter une transfusion, d’autant que le recueil peropératoire du sang dans les flacons de drainage peut compenser une partie de ces pertes.

Cependant, l’anémie est fréquente dans la PR, imposant des mesures préventives préopératoires (thérapeutique ferrique, stimulation de l’érythropoïèse) ou peropératoires par agent médicamenteux diminuant le saignement.

Greene a souligné l’importance de l’état nutritionnel préopératoire : tout déficit est facteur de complications cicatricielles et donc infectieuses.

Le risque septique d’une arthroplastie n’apparaît pas différent après coxite rhumatoïde : dans la série de Schmalzried portant sur plus de 3 000 prothèses, le taux d’ infection est de 0,7 % dans l’arthrose et de 1,3 % dans la PR.

Ces chiffres se sont améliorés, du moins pour les infections périopératoires, depuis l’ optimisation des conditions d’asepsie (salle opératoire spécifique, antibioprophylaxie).

Le risque d’ infection tardive est moins maîtrisé chez des patients immunodéprimés présentant de fréquentes portes d’entrée cutanées.

* Spécificités techniques :

Les arthroplasties de la coxite rhumatoïde posent des problèmes techniques spécifiques.

En chirurgie de première intention, la voie d’abord de la coxofémorale est un choix personnel de l’ opérateur : postérieure avec myotomie des pelvitrochantériens ou voie antéroexterne avec myotomie partielle des fessiers (Hardinge ou variantes).

En cas d’ankylose serrée, de protrusion acétabulaire et d’ostéoporose fragilisante, il est plus sûr de réaliser la cervicotomie tête en place puis d’extraire celle -ci afin d’éviter toute fracture trochantérienne ou diaphysaire.

Le rétablissement d’un centre rotatoire coxofémoral en situation anatomique est obligatoire en cas de protrusion acétabulaire, tant pour obtenir un résultat clinique satisfaisant que pour la longévité prothétique.

La tête fémorale fragmentée en copeaux spongieux sert d’autogreffe de comblement de l’arrière -fond cotyloïdien. Le débat sur le type d’ implant reste ouvert.

Les arthroplasties cimentées type Charnley ont été les premières implantées.

Le taux de survie des arthroplasties cimentées se situe entre 77 et 79 % à 10 ans.

Ces chiffres sont probablement pessimistes car ne tiennent pas compte des améliorations techniques du scellement.

Plus récemment, les prothèses non cimentées dites de deuxième génération ont été proposées dans la coxite rhumatoïde.

Pour l’acétabulum, les cotyles hémisphériques métalliques impactés et vissés ont acquis, dans la chirurgie de première intention, leurs lettres de noblesse.

Dans la PR, la rigidité du cotyle métallique au sein de l’ostéoporose régionale, la perturbation par la thérapeutique anti-inflammatoire de l’ostéogenèse nécessaire à la colonisation secondaire des implants semblent à première vue autant d’ obstacles à l’ utilisation du sans ciment.

Cependant, les résultats cliniques et radiologiques d’implant sans ciment, certes à moyen terme, sont encourageants, y compris pour les surfaces bioactives.

Cracchiolo souligne cependant la fréquence, avec un recul de 2 à 6 ans, de liserés radiologiques périacétabulaires (13 %) ou périfémoraux (53 %), mais n’ayant conduit à aucune révision.

Lachiewicz confirme cette notion, constante à 4 ans de recul sur 35 tiges sans ciment, 10 % d’entre elles entourées d’un liseré continu.

Dans la série plus modeste de Loehr, il a été mis en évidence cinq migrations millimétriques sur 22 cotyles sans ciment et de trois tiges, toutes asymptomatiques.

Ainsi, dans la coxite rhumatoïde, l’implant acétabulaire se caractérise par un taux relativement élevé de complications mécaniques , en tout cas à un niveau supérieur à celui des coxarthroses.

Les cupules sphériques impactées semblent offrir une alternative prometteuse plus risquée pour les tiges non cimentées.

Ceci justifie l’option d’implant hybride cimenté en fémoral, impacté et vissé dans l’acétabulum.

2- Genou rhumatoïde :

L’atteinte rhumatoïde du genou est fréquente (75 %), rarement inaugurale, et se distingue de la coxite rhumatoïde par une longue phase de synovite accessible à un traitement médical ou chirurgical conservateur.

La bilatéralité est habituelle, de même que la simultanéité coxofémorale.

* Caractéristiques anatomiques du genou rhumatoïde :

La synovite hypertrophique est responsable de la douleur, d’une limitation de la mobilité et d’épanchements récidivants.

Elle précède la phase d’ altération cartilagineuse irréversible.

La disparition des surfaces articulaires intéresse les divers compartiments du genou, mais parfois de manière asymétrique.

La prédominance latérale des lésions rend compte de la tendance au valgus.

Cette même asymétrie lésionnelle se retrouve pour l’ os spongieux métaphysoépiphysaire.

Ainsi, dans les formes évoluées et négligées, le genou rhumatoïde associe valgus et flessum irréductibles secondaires aux lésions ostéoarticulaires mais aussi ligamentaires comportant distensions et ruptures dans la convexité et rétraction dans la concavité de la déviation frontale.

Un simple cliché face- profil en charge permet de reconnaître les étapes évolutives du genou rhumatoïde.

* Chirurgie du genou rhumatoïde :

La synovectomie chirurgicale est moins pratiquée depuis l’avènement des synoviorthèses chimiques ou isotopiques.

La technique opératoire est menée par une incision unique pararotulienne médiane ou deux incisions parallèles pararotuliennes.

La synovite est excisée « en bloc » dans le cul-desac quadricipital et les joues latérales condyliennes.

En flexion du genou, rotule luxée, la synovectomie est complétée au contact du tissu adipeux rétrotendineux et dans l’échancrure autour du pivot central.

L’analgésie par cathéter fémoral permet une mobilisation postopératoire immédiate.

Certains ont proposé une option arthroscopique pour réaliser ce geste, avec un résultat clinique tout autant appréciable.

La présence d’un kyste poplité volumineux, en fait expansion diverticulaire postérieure de la synovite rhumatoïde, fait l’objet d’un geste spécifique d’exérèse, concomitant ou indépendant.

Son abord nécessite une voie postérieure en décubitus ventral, avec dissection des éléments vasculonerveux du creux poplité.

L’arthroplastie dans le genou rhumatoïde intéresse les trois compartiments articulaires.

Dans ce contexte, plusieurs points restent à discuter.

La gestion des pertes sanguines et les techniques de substitution par transfusion ont été évoquées pour les arthroplasties de hanche.

Dans les atteintes bilatérales, la réalisation simultanée des deux arthroplasties du genou a été proposée sous réserve d’une stimulation médicamenteuse préopératoire de l’érythropoïèse et d’un recueil-réinjection des pertes sanguines.

Cet auteur ne signale pas un taux plus élevé de complications, en particulier d’embolies graisseuses ou de thrombophlébites.

L’abord médial ou latéral est lié à l’importance de la déformation frontale préopératoire et à la rétraction des parties molles.

Une déformation fixée en valgus-rotation externe impose un abord de type Keblish qui ne se limite pas à une incision latérale mais comporte l’allongement du fascia lata, la préservation du ligament adipeux pour assurer la fermeture de l’arthrotomie, la désinsertion du ligament collatéral latéral et du point d’angle.

Le danger demeure une libéralisation trop extensive, source de laxité frontale.

Miyasaka recommande de conserver au moins un des éléments stabilisateurs latéraux ou, en cas d’importante laxité, d’utiliser une prothèse contrainte.

La conservation ou le sacrifice du ligament croisé postérieur sont certes liés au choix de l’ opérateur, mais aussi aux conditions précédemment décrites.

En l’absence de déformation majeure, l’attitude vis-à-vis du pivot central est discutée. Laskin signale la possibilité de rupture secondaire, car le ligament est lui-même constamment porteur de lésions au moins histologiques.

Aglietti et Schai, avec un recul minimal de 10 ans, ne signalent pas ce type de complication dans le cadre de la PR, mais ils insistent sur la rigueur de l’équilibre ligamentaire peropératoire.

Outre une meilleure proprioceptivité et un mouvement intraprothétique plus proche de la physiologie, la conservation du ligament croisé postérieur diminuerait les contraintes sur les interfaces os-implants.

Le type de fixation de la prothèse avec ou sans ciment est discuté.

Certains ont insisté sur la fréquence des liserés radiologiques à l’interface direct os-implant tibial à moyen terme ; d’autres soulignent la stabilité clinique des implants sans ciment.

L’étude rétrospective menée par Rand, portant sur près de 3 000 prothèses dans le genou de rhumatoïde, n’identifie pas le type de fixation des implants comme facteur péjoratif.

De même, Nilson, utilisant une méthode radiologique précise, ne met pas en évidence de différence significative entre fixation avec ou sans ciment.

La présence d’un tassement du massif spongieux épiphysaire tibial ou de volumineux kystes intraspongieux impose en revanche une autogreffe protégée par un plateau comportant une quille médiane métaphysaire ou une tige centromédullaire.

Enfin, l’utilisation d’un implant de resurfaçage patellaire n’est pas systématique pour certains.

Dans un avenir proche, le pilotage informatisé des coupes osseuses et de la position des implants doit permettre un contrôle encore plus rigoureux de la pose de l’arthroplastie, tant pour sa situation spatiale que pour la tension ligamentaire.

3- Atteintes rhumatoïdes du pied :

* Généralités :

Les atteintes rhumatoïdes du pied sont fréquentes, souvent inaugurales et polymorphes.

Outre leur caractère algique et destructeur, elles aboutissent à des déformations fixées s’autoaggravant, dans la genèse desquelles participent les contraintes mécaniques, le retentissement réciproque avant-arrièrepied, mais aussi la morphologie globale du pied.

* Gestes opératoires :

+ Avant-pied :

L’atteinte de l’avant-pied est quasi constante dans la PR.

L’arthrite est diffuse à l’ensemble des métatarsophalangienne (MTP), d’abord inflammatoire puis destructrice, entraînant des déformations progressives axiales rapidement irréductibles.

La MTP du gros orteil présente une déviation en valgus avec pronation distale ; la déformation en varus est plus exceptionnelle.

Les MTP des orteils évoluent vers une luxation dorsale irréductible et une griffe fixée axée ou en clinodactyle.

Il s’ensuit de multiples conflits cutanés au niveau de la face latérale de la MTP du gros orteil et les faces dorsales des IPP des orteils, sources de difficulté de chaussage mais aussi d’ulcérations susceptibles de s’infecter.

De plus, les métatarsalgies sont au premier plan, par insuffisance du premier rayon, griffes des orteils et surtout saillie des têtes métatarsiennes, d’autant qu’existe une modification du capiton plantaire cutané.

En effet, la luxation dorsale des orteils tend à translater vers l’avant la zone la plus épaisse du capiton, ne laissant au niveau des têtes luxées métatarsiennes qu’une peau fine, risquant de s’ulcérer et ayant peu d’effet protecteur.

La chirurgie de l’avant-pied rhumatoïde répond à une technique univoque : l’ensemble des orteils doivent être opérés par l’association arthrodèse MTP de l’hallux et arthroplastie modelante des MTP latérales.

La première MTP définitivement fixée offre en effet la meilleure garantie pour s’opposer à la récidive du valgus, mais aussi à la déviation des autres orteils.

Les implants en silicone ont été proposés pour conserver la mobilité MTP, mais ont été progressivement abandonnés en raison de complications mécaniques, de ruptures et/ou de récidives du valgus.

Quelques auteurs leur sont restés fidèles.

Les prothèses totales de MTP ont une très faible diffusion en raison de leur coût et de leur mise au point récente. Barouk a proposé une prothèse métallique provisoire d’interposition.

La fixation de la première MTP est systématique, même si les lésions articulaires paraissent discrètes par rapport à celles des orteils voisins.

L’arthrodèse de la MTP de l’hallux permet au premier rayon d’assurer sa fonction d’appui, stabilise définitivement l’interligne et supprime un facteur de récidive de déviation fibulaire des orteils.

Son réglage est précis : 15 à 20° de flexion dorsale, valgus de 10°.

La fixation par vis proximodistale à partir de la face inférieure du col, complétée par une broche antirotatoire, est une technique fiable, tout autant qu’une miniplaque dorsale.

Le niveau de la résection céphalique nécessaire au contact étroit métatarsophalangien se situe à l’aplomb de la résection de la deuxième tête métatarsienne.

Ainsi, certains préconisent de débuter par le temps de résection céphalique des orteils latéraux et de terminer par l’arthrodèse.

Une fois la fusion acquise, le résultat sur la douleur, et en particulier sur le conflit orteils-chaussure, est excellent.

Le déroulement du pas se fait de manière correcte pour une marche à cadence normale : l’impulsion ne s’effectue plus que dans l’IP.

Celle -ci peut s’altérer avec l’évolution rhumatismale et/ou la surcharge fonctionnelle.

Dans quelques cas, chez des patients dont la PR est très peu évolutive, parfaitement maîtrisée par le traitement, et sans atteinte cartilagineuse, l’hallux valgus peut être traité, selon les techniques réservées aux formes statiques (ostéotomie métatarsienne de valgisation, ostéotomie phalangienne…).

La résection arthroplastique des têtes métatarsiennes maintenues en distraction par une broche axiale pendant 3 à 4 semaines aboutit à une néoarticulation fonctionnelle et indolore.

L’orteil est axé, sans flexion interphalangienne majeure et avec une mobilité essentiellement passive des MTP.

Enfin et surtout, la saillie plantaire des têtes métatarsiennes est supprimée.

La résection céphalique se fait selon une progression inscrite sur une parabole médiolatérale et doit intéresser l’ensemble des quatre rayons latéraux.

La voie d’abord dorsale ou plantaire, ainsi que le trajet et le nombre des incisions, restent discutés.

Pour notre part, ces gestes opératoires sont réalisés par trois incisions longitudinales : la première au bord médial du rayon permet d’arthrodéser la MTP du gros orteil par vissage, tandis que les résections céphaliques sont menées par deux abords commissuraux (deuxième et quatrième).

Le brochage pulpophalango-métatarsien en distraction reste le meilleur moyen d’éviter l’échec technique de la résection qui est l’arthrodèse MTP fonctionnellement gênante.

Barouk a proposé l’interposition provisoire d’une cupule métallique solidaire de la broche axiale.

Le maintien pendant 2 à 3 jours des cathéters qui ont assuré l’anesthésie locorégionale permet un bloc tronculaire d’une grande efficacité analgésique.

Les soins postopératoires sont particulièrement importants : physiothérapie antioedème, marche avec chaussure en talus avec appui talonnier unique, appareillage de rappel dynamique en flexion des orteils.

Après l’ablation des broches, cette rééducation est intensifiée dans le but d’assouplir les orteils latéraux.

Le chaussage est adapté, comportant une orthèse avec capiton plantaire de confort et soutien médioplantaire interne.

+ Médiopied et arrière-pied :

L’arthrite rhumatoïde du médiopied et de l’arrière-pied est fréquente, et de traduction schématique en trois tableaux : évolution fusionnante globale spontanée sans déformation, atteinte prédominante d’un seul interligne, déformation progressive globale en valgus.

Seules les deux dernières atteintes font l’objet d’un geste d’arthrodèse.

Une déformation valgisante sous-talienne modifie considérablement l’appui plantaire, aggrave les déformations de l’avant-pied et retentit sur l’interligne tibiotarsien.

Elle répond à une arthrodèse médio- et sous-talienne de difficulté variable.

La présence d’une déformation majeure impose un temps de réduction avant de fixer les différents interlignes : le valgus-pronation de l’arrière-pied est lié à une translation latérale de l’os naviculaire et une subluxation médiale et plantaire du talus.

La déformation a donc pour siège initial et principal l’interligne talonaviculaire.

Le contrôle de ces interlignes impose deux abords : latéral pré- et sousmalléolaire pour le sous-talien et le talocuboïdien médial pour le talonaviculaire.

La réduction des déplacements et l’avivement articulaires créent un espace interosseux qu’il faut combler par autogreffe iliaque ou locale.

Chaque interligne est fixé par une ou deux agrafes. Les expériences rapportées font état d’un taux de pseudarthroses, de réduction incomplète et de complications cutanées non négligeable.

Ces notions soulignent l’intérêt d’une chirurgie précoce, avant l’installation de déformations fixées, ou d’un geste préventif.

Ainsi, l’arthrodèse talonaviculaire stabilise efficacement le couple de torsion et bloque la tendance au pied plat valgus.

Une ostéosynthèse stable par agrafe après un avivement soigneux, une autogreffe spongieuse encastrée dans l’interligne et une immobilisation de plusieurs semaines sont la clef du succès.

La tolérance à long terme de cette arthrodèse est excellente.

Cependant, toute fusion spontanée ou opératoire d’un interligne de l’arrièrepied ou du médiopied surcharge fonctionnellement les articulations de voisinage et doit tempérer cet optimisme.

+ Cheville :

À la cheville, deux interventions sont proposées : l’arthrodèse ou l’arthroplastie.

L’arthrodèse tibiotalienne dans le cadre de la PR pose le problème de la position optimale de fusion et de la technique de fixation.

Bresler recommande de bloquer le talus à 90° sous le tibia, en très léger valgus et 10° de rotation externe.

Les techniques d’ostéosynthèse sont multiples : vissage, plaque, matériel transplantaire.

Tous répondent à deux principes incontournables : affrontement tibiotalien optimal, stabilité primaire de la fixation d’ostéosynthèse.

Les complications apparaissent fréquentes dans les séries de la littérature, tant les infections que les pseudarthroses, dont le taux varie entre 20 et 40 %.

L’arthrodèse est réalisable sous arthroscopie avec distraction provisoire de l’interligne, avivement à la fraise motorisée, puis ostéosynthèse par vis placées sous contrôle scopique.

Les premiers résultats des arthrodèses arthroscopiques sont encourageants, les avantages étant des suites opératoires simplifiées et l’absence de complication locale tout en gardant la fiabilité des techniques classiques.

Cependant, l’arthrodèse sous arthroscopie ne peut être envisagée en cas de déformation majeure, difficilement corrigible sans libération extensive.

Une fois la fusion acquise, le résultat sur la douleur est excellent, mais les performances de la marche ne sont pas améliorées et la plupart des patients nécessitent orthèse ou chaussure orthopédique.

Le retentissement à long terme sur l’articulation sous-talienne et médiotarsienne, dont la surcharge mécanique est accrue, se vérifie dans le cadre de la PR.

De même, l’arthrodèse tibiotalienne retentit sur le genou en modifiant la marche.

C’est dire que son indication doit tenir compte de l’état articulaire présent des articulations sus- et sous-jacentes dans ce contexte rhumatologique, et ce d’autant que son caractère définitif est évident.

Issues des expériences malheureuses anciennes, les prothèses actuelles de cheville dites de troisième génération sont à trois composants et possèdent une double articulation : glissement antéropostérieur entre implant métallique tibial et polyéthylène, et mouvement de bascule sagittal entre polyéthylène et dôme métallique talien cylindrique.

Le type de fixation, avec ou sans ciment, les éléments de stabilité primaire des implants tibial et talien, le dessin et la congruence de l’interface polyéthylène-prothèse talienne, l’arthrodèse associée de la tibiofibulaire, font la différence entre les différents implants.

Les résultats à court et moyen termes affichent une fiabilité certaine : Kofoed fait état d’un taux de survie de 75 % à 14 ans.

L’indolence est obtenue dans la majorité des cas ; la mobilité active tibiotalienne réelle, évaluée radiologiquement, est de l’ordre d’une vingtaine de degrés, mais située dans un secteur fonctionnel, même si certains problèmes biomécaniques et techniques restent incomplètement résolus (ancrage prothétique, tension ligamentaire).

C – RACHIS :

Les atteintes rhumatoïdes du rachis dorsal et lombaire sont rares (moins de 5 %) et ne semblent pas poser de problèmes thérapeutiques majeurs.

L’atteinte rhumatoïde du rachis cervical est au contraire très répandue, venant au deuxième rang après celle des MCP, avec une prévalence pouvant atteindre 80 %.

Cette fréquence tient à l’abondance du tissu synovial, à la variété et au nombre des mouvements, à l’importance des contraintes mécaniques du rachis cervical.

Les atteintes cervicales sont exceptionnellement inaugurales.

Elles compliquent la maladie après quelques années, surtout dans les formes érosives sévères, et progressent parallèlement aux atteintes des membres.

Toutefois, elles restent longtemps méconnues, qu’elles soient asymptomatiques ou masquées par les localisations périphériques de la maladie.

Une fois sur deux, elles sont d’ailleurs de découverte radiologique.

Lorsqu’elles s’expriment cliniquement, c’est surtout par des douleurs locales ou irradiées.

Les complications neurologiques centrales, médullaires ou bulbomédullaires sont beaucoup plus rares (1 %) mais très graves, avec risque de mort subite, justifiant un dépistage clinique et radiologique systématique.

1- Physiopathologie :

Les lésions du rachis cervical supérieur sont les plus fréquentes (trois fois sur quatre) et les plus graves.

Elles se décomposent en cinq variétés, plus ou moins associées.

– La luxation atloïdoaxoïdienne antérieure (40 à 75 % des cas) se définit par un écart de plus de 3 mm, en position neutre, entre l’arc antérieur de l’atlas et l’odontoïde.

Elle est due à la destruction du ligament transverse par la prolifération synoviale de la bourse séreuse périodontoïdienne.

Ce pannus est en outre érosif pour l’odontoïde qui peut s’amincir, voire se fracturer.

Le volume du pannus a un effet compressif direct sur la jonction bulbomédullaire.

Au début, la compression est intermittente, dynamique, se produisant ou s’aggravant en flexion, se réduisant en extension.

À la longue, le déplacement s’aggrave et peut même se fixer, la compression devenant permanente.

Ce processus fait également subir un étirement aux artères vertébrales.

D’une manière générale, il n’y a pas de parallélisme franc entre le décalage intervertébral et les lésions neurologiques.

– La luxation atloïdoaxoïdienne verticale, ou ascendante, ou « impression basilaire » est présente dans 20 à 30 % des cas.

Elle aboutit à l’ascension de l’odontoïde dans le trou occipital.

Le mécanisme est celui d’une érosion-lyse des masses latérales de l’atlas par synovite des articulations occcipitoatloïdiennes et atloïdoaxoïdiennes, les condyles occipitaux et les massifs articulaires supérieurs de l’axis pouvant être également touchés.

Au maximum peut se produire une fracture-séparation des arcs antérieur et postérieur de l’atlas, accentuant le rapprochement du crâne et de l’axis.

Ce type de luxation est le plus grave car l’odontoïde soulève la face antérieure de la jonction bulbomédullaire, en même temps que le segment intradural des deux artères vertébrales.

Elle peut s’associer à une luxation antérieure qu’elle risque de masquer radiologiquement, l’arc antérieur de C1 ayant tendance à se diriger vers le bas mais aussi en arrière, venant au contact du corps de l’axis.

– La luxation atloïdoaxoïdienne latérale représente 10 à 20 % des cas : c’est la conséquence d’une lésion articulaire atloïdoaxoïdienne unilatérale compatible avec l’intégrité du ligament transverse.

Au maximum, la masse latérale vient au contact de l’odontoïde.

Ses complications neurologiques sont rares mais elle peut entraîner un torticolis irréductible.

– La luxation atloïdoaxoïdienne rotatoire a une fréquence propre difficile à apprécier car elle est souvent associée à une luxation latérale.

Elle suppose un mécanisme double, atteinte d’une articulation atloïdoaxoïdienne latérale et lésion du ligament transverse. Les complications neurologiques sont rares.

La luxation atloïdoaxoïdienne postérieure est rare (2 à 7 %) et succède à un amincissement ou à une fracture de l’odontoïde, plus rarement à une destruction de l’arc antérieur de l’atlas.

– Les lésions du rachis cervical inférieur (environ 25 %) résultent d’une synovite érosive articulaire postérieure.

Celle-ci se traduit par une subluxation puis, à partir de 5 mm, un antélisthésis le plus souvent étagé (luxation axiale), donnant au rachis un profil caractéristique en « marches d’escalier ».

Les étages le plus souvent touchés sont C4-C5 et C3-C4. Radiologiquement, l’aspect n’est pas très différent de celui des lésions dégénératives de l’arthrose, ces dernières étant moins érosives.

Ces décalages, sensibles aux épreuves dynamiques, n’entraînent que rarement des complications neurologiques médullaires ou même radiculaires.

2- Signes cliniques et radiologiques :

Les luxations atloïdoaxoïdiennes se traduisent par des douleurs cervicales ou irradiées, plus rarement par des signes neurologiques objectifs.

Les cervicalgies sont plutôt hautes, de déterminisme volontiers mécanique, aggravées notamment par les mouvements rotatoires.

Elles s’accompagnent dans deux tiers des cas d’une limitation des mouvements du cou.

Les troubles statiques, les torticolis sont plus rares, qu’ils soient dus à des contractures antalgiques ou à l’importance du décalage intervertébral.

Ces douleurs cervicales ont parfois des irradiations antérieures atypiques, vers les régions frontales, orbitaires, temporales.

Beaucoup plus caractéristique est la névralgie d’Arnold, uni- ou bilatérale, par souffrance de la branche postérieure de C2 à l’arrière de l’articulation atloïdoaxoïdienne.

Les complications neurologiques sont dominées par le risque d’une compression médullaire cervicale haute, en principe progressive.

L’atteinte motrice se révèle plutôt aux membres supérieurs, par une parésie, et peut aboutir à une tétraplégie complète.

Cette symptomatologie déficitaire est difficile à apprécier au début, quand elle se surajoute à l’impotence motrice d’origine articulaire et musculaire ancienne.

De surcroît, l’hyperréflexie du syndrome pyramidal peut être masquée par une neuropathie périphérique.

L’atteinte médullaire est parfois responsable des paresthésies diffuses et distales, dominant aux membres thoraciques, que l’on risque de rapporter à un syndrome du canal carpien.

Plus rare, le signe de Lhermitte a l’avantage d’attirer nettement l’attention sur la moelle cervicale.

Les atteintes du bulbe et/ou des derniers nerfs crâniens sont possibles dans les formes évoluées.

Elles sont à l’origine de névralgies trigéminales, de troubles de la phonation et de la déglutition.

Ce sont elles qui font courir à ces patients le risque de mort subite, parfois provoquée par un traumatisme minime, voire une intubation.

Il est possible qu’au facteur purement mécanique de la compression bulbaire s’ajoute un facteur ischémique lié aux contraintes subies par les artères vertébrales.

Les luxations subaxiales du rachis cervical inférieur ont une expression clinique peu spécifique, qu’il s’agisse de cervicalgies, de névralgies cervicobrachiales, de signes de souffrance médullaire.

Le diagnostic précoce se heurte aux mêmes difficultés que dans le cas des atteintes craniorachidiennes.

Les atteintes rachidiennes de la PR s’aggravent radiologiquement dans 80 % des cas et cliniquement dans une moindre proportion, environ un cas sur deux.

En fait, seules les PR avec complications médullaires ont une réelle gravité, conditionnant nettement le pronostic vital dans les 5 à 6 années qui suivent leur découverte.

L’examen radiographique standard (face, face bouche ouverte, clichés de profil en conditions dynamiques) reste indispensable pour évaluer les anomalies statiques (niveau et degré des luxations, perte de la lordose), mais surtout l’influence de l’hyperflexion et de l’hyperextension sur les listhésis.

L’examen tomodensitométrique (TDM) n’a qu’une place modeste.

Il montre nettement les contours osseux grâce à l’usage des fenêtres osseuses et peut aider à mieux comprendre les déplacements à l’aide des reconstructions sagittales, coronales, voire 3D.

C’est en fait l’examen d’imagerie par résonance magnétique (IRM) qui complète le mieux la radiographie conventionnelle : il visualise à la fois la partie basse de la fosse postérieure et la totalité du canal cervical, détaillant les rapports vertébromédullaires, révélant l’ampleur du pannus synovial, montrant les déformations de la moelle et la myélomalacie, et visualisant le système vertébrobasilaire.

2- Technique opératoire :

Seules sont évoquées les techniques opératoires destinées au rachis cervical.

En cas de luxation atloïdoaxoïdienne antéropostérieure réductible, l’abord postérieur suffit le plus souvent pour réduire et stabiliser.

Cette stabilisation comporte toujours une ostéosynthèse. Idéalement, on favorise l’arthrodèse par la pose de greffons interlamaires.

Il n’empêche que le taux de pseudarthrose reste élevé.

La longueur du montage est discutée.

Le montage court, limité au couple C1-C2, utilise des vis transarticulaires ou des crochets interlamaires.

Il est bien toléré, n’aggrave pas la limitation des mouvements du cou, ne semble pas favoriser une déstabilisation secondaire des étages sousjacents.

Il peut se révéler fragile, surtout si l’arthrodèse échoue.

Il ne prévient pas totalement le risque évolutif d’une luxation verticale associée.

C’est pourquoi certains préfèrent de principe une fixation occipitocervicale, immobilisant plus solidement la charnière craniorachidienne mais risquant d’anéantir la faible mobilité résiduelle du patient.

La prise supérieure de ce montage se fait sur l’écaille occipitale par des vis ou des crochets.

Le prise inférieure se fait sur le rachis cervical moyen par des crochets prenant les lames en tenaille.

Le site de cette prise doit être soigneusement discuté en fonction d’éventuelles lésions associées au rachis cervical moyen et inférieur et du risque de déstabilisation du segment sous-jacent à l’ostéosynthèse.

En cas de luxation antéropostérieure peu ou pas réductible, certains proposent l’exérèse par voie antérieure endobuccale de l’apophyse odontoïde et du pannus, geste purement décompressif et forcément couplé à une fixation postérieure.

La lourdeur de ce double abord conduit souvent à préférer la seule voie postérieure qui peut comporter une phase décompressive avec la résection de l’arc postérieur de l’atlas, voire l’agrandissement du bord postérieur du trou occipital.

Mais le temps de fixation (obligatoirement craniorachidienne s’il y a eu résection de l’arc postérieur de l’atlas) reste essentiel, car il supprime l’éventuel reliquat d’instabilité et permet parfois la régression spontanée du pannus, donc une décompression complémentaire différée.

La luxation verticale, qu’elle soit isolée ou associée à d’autres déplacements, impose une fixation occipitocervicale.

Le reproche fait à cette technique de supprimer tous les mouvements du cou est relativisé par la faible, voire nulle, mobilité préopératoire des patients.

Les rares luxations atloïdoaxoïdiennes latérales et/ou rotatoires se prêtent plus volontiers à l’ostéosynthèse occipitocervicale.

Les luxations subaxiales du rachis cervical inférieur, souvent plus réductibles, peuvent être abordées par voie antérieure ou postérieure, en traction du membre des étages atteints et de la prédominance antérieure ou postérieure de la compression.

La technique ne diffère pas de celle de la chirurgie des lésions arthrosiques : arthrodèse intersomatique et plaque vissée par voie antérieure, plaques vissées dans les massifs articulaires par voie postérieure.

D – STRATÉGIE ET INDICATIONS OPÉRATOIRES :

Les indications opératoires sont posées en symbiose avec le rhumatologue.

Pour lui, l’évolutivité locale de la maladie, marquée par la persistance du pannus ou l’apparition d’une perte du capital cartilagineux, devient une indication opératoire potentielle ou tout du moins impose un avis chirurgical.

1- Indications opératoires par articulation :

* Membre thoracique :

Les indications opératoires à l’épaule sont étroitement liées à la localisation précise du pannus rhumatoïde, aux destructions ostéocartilagineuses, à l’état fonctionnel de la coiffe des rotateurs.

Malgré ces lésions, la tolérance fonctionnelle est en général longtemps bonne : le patient n’est réellement gêné que par la douleur et surtout la perte de la flexion antérieure et des rotations, ne permettant plus les gestes main-bouche ou main-fesse.

Les trois types d’intervention ont des indications relativement bien codifiées mais de fréquence très inégale. L’arthrodèse glénohumérale est d’indication exceptionnelle : lésion massive de la coiffe des rotateurs, perte de la fonction du deltoïde, échec d’une arthroplastie.

De même, il est rare de se trouver en présence d’une bursite isolée sousacromiodeltoïdienne sans rupture de coiffe ni atteinte glénohumérale, qui relève alors d’une bursectomie.

Ainsi, l’arthroplastie est devenue le traitement opératoire de choix de l’arthrite rhumatoïde glénohumérale.

Le remplacement prothétique est indiqué chez les patients algiques à fonction limitée avec destruction articulaire.

Le pincement de l’interligne glénohuméral est le critère essentiel pour proposer l’arthroplastie.

La prothèse totale d’épaule non contrainte est indiquée en cas de destruction des deux versants articulaires, avec un stock osseux suffisant pour autoriser une fixation correcte de l’implant glénoïdien et une coiffe des rotateurs anatomiquement intacte (ou réparée).

Le remplacement isolé de l’humérus est indiqué lorsqu’il existe une destruction glénoïdienne compromettant toute fixation d’un implant, ou une rupture irréparable de la coiffe des rotateurs entraînant une ascension de la tête humérale : l’arthroplastie a, dans ce cas, un objectif limité au seul retour de l’indolence.

L’arc fonctionnel du coude va de 30 à 130° de flexion, 50° de pronation et 50° de supination, et permet de réaliser la plupart des activités quotidiennes. Ceci explique une certaine tolérance des lésions du coude rhumatoïde.

Au coude, la synovectomie ou l’arthroplastie sont discutées en cas d’importantes douleurs et de déficits majeurs de mobilité active.

Cependant, la particularité de l’atteinte du coude vient de l’installation d’une laxité frontale à la fois ligamentaire et ostéocartilagineuse.

Ainsi faut-il proposer précocement une synovectomie avec résection céphalique radiale lorsque les interlignes sont conservés, le coude stable, la synovite abondante.

Les destructions articulaires avec laxité relèvent de l’arthroplastie lorsque le retentissement clinique est important.

Au poignet, les indications opératoires doivent être fréquentes et précoces.

Il est bien rare qu’un patient atteint d’une PR ne relève tôt ou tard d’un geste chirurgical sur le poignet.

Une synovite dorsale rebelle au traitement médical impose une synovectomie avec stabilisation de la RUD. Ce geste technique (ou poignet dorsal) marque un coup d’arrêt à l’évolution inflammatoire destructrice, certes pour un temps limité, et prévient des ruptures tendineuses.

Les gestes d’arthrodèses sont réalisés après analyse radiologique en privilégiant les fusions partielles.

L’arthrodèse radio-ulnaire n’est proposée que lorsque l’interligne médiocarpien est conservé, et en particulier le capitolunaire.

Les atteintes diffuses et les grandes désaxations carpiennes sont stabilisées par une arthrodèse radiocarpienne.

À la main, la réductibilité des déformations et l’intégrité des surfaces articulaires permettent de prolonger les mesures thérapeutiques non opératoires basées sur la rééducation et le port d’orthèses.

Ici plus qu’ailleurs, la prise en charge du patient par le médecin rééducateur à la tête d’une équipe comprenant kinésithérapeute, ergothérapeute, orthésiste, est fondamentale.

La déviation ulnaire des doigts longs par atteinte des MCP est longtemps accessible au traitement conservateur, sauf en présence d’une désaxation du poignet en inclinaison radiale ; celle-ci doit alors faire l’objet d’un geste correcteur préalable.

Dans les PR anciennes associant déviation ulnaire et raideur des IPP, l’adaptation fonctionnelle est parfois surprenante et modère d’autant les indications opératoires.

Les déformations des IPP (« col de cygne » et « boutonnière ») passent par une phase de réductibilité corrigible par orthèse ou par un geste opératoire de rééquilibration tendineuse.

Les déformations en « col de cygne » sont particulièrement mal tolérées, car elles suppriment la possibilité d’enroulement du doigt, le rendant très peu fonctionnel ; l’indication opératoire est donc fréquente, même si l’objectif modeste est de permettre au doigt de se fermer sur une prise.

Enfin, le rôle fonctionnel du pouce étant majeur, les indications sont fréquentes.

La déformation en « Z », dont le siège initial est la MCP, est un exemple de chirurgie « gagnante » de la PR.

* Membre pelvien :

À la hanche, la seule alternative opératoire est l’arthroplastie totale.

Face à une coxite rhumatoïde, l’équipe médicochirurgicale pose cette indication devant une diminution des capacités fonctionnelles avec disparition de l’interligne.

L’âge du patient doit faire clairement évoquer avec lui la longévité des implants.

Lorsque la coxite est la seule atteinte rhumatoïde ou que les autres articulations ont déjà fait l’objet d’un geste opératoire, l’indication d’arthroplastie ne prête pas à discussion.

Dans le cas contraire, une hiérarchisation des actes opératoires s’impose et tient compte de l’ensemble des atteintes rhumatoïdes aux deux membres.

Les choix techniques sont plus liés aux options personnelles de l’opérateur.

L’évaluation de la trophicité osseuse devrait permettre de se baser sur des critères objectifs pour choisir entre implants cimentés ou à surface réhabitable.

Au genou, synovectomie et prothèse ne sont pas concurrentes mais proposées à des étapes évolutives différentes.

Il reste quelques indications de synovectomie chirurgicale en présence d’une synovite hypertrophique sans altération radiologique et macroscopique du cartilage.

L’arthroplastie est indiquée dès qu’un ou plusieurs interlignes sont détruits et qu’apparaissent un flessum et une déviation frontale.

La même problématique quant à la longévité se pose pour les prothèses de genou.

Schématiquement, il existe deux tableaux cliniques : perte du capital cartilagineux mais genou axé, mobile et hyperalgique, ou dévié frontalement et laxe.

Au premier, une arthroplastie totale est proposée avec des implants classiques éventuellement conservant le ligament croisé postérieur ; pour le deuxième, il est à prévoir des implants plus contraints, le plus souvent postérostabilisés et comportant des extensions diaphysaires et/ou métaphysaires métalliques assurant une stabilité primaire maximale.

De manière exceptionnelle, il reste quelques indications de correction angulaire frontale par ostéotomie suivant de strictes indications : PR « éteinte » ou parfaitement maîtrisée médicalement, persistance d’un capital cartilagineux suffisant, déviation frontale nette.

La chirurgie de la cheville n’est indiquée que pour une arthrite destructive douloureuse enraidissante.

Il est alors fondamental d’évaluer l’état des interlignes sous-talien, médiotarsien et l’axe global de l’arrière-pied.

L’importance respective de la tibiotalienne et de l’arrière-pied dans la genèse de la déviation frontale doit être appréciée.

Une déviation fixée en valgus ne peut en aucun cas être compensée dans la pose unique d’une arthroplastie ; c’est donc une contre-indication, du moins jusqu’à la correction première par arthrodèse sous-talienne et médiotarsienne de cette déviation.

L’arthrodèse de la cheville n’est indiquée que devant une déviation majeure tibiotalienne et talocalcanéenne.

Ces deux interlignes peuvent être fixés dans le même temps.

La PR demeure la meilleure indication actuelle des arthroplasties de cheville.

Les arguments sont multiples : protection du genou qui tend à compenser tout blocage tibiotalien, conservation d’une mobilité de l’arrière-pied car les autres interlignes ne peuvent assurer aucune compensation, demande fonctionnelle toute relative du patient rhumatisant.

L’arthrodèse talonaviculaire isolée apparaît comme un véritable geste préventif de la déformation valgisante tarsienne et de l’effondrement de l’arche médiale.

Ses indications sont strictes : arthrite évoluée, algique, nettement prédominante à cet interligne et sans déviation du tarse postérieur.

Les mérites de cette arthrodèse doivent être vantés aux rhumatologues et son intérêt « préventif » souligné auprès des patients.

Une arthrite algique sous-talienne et médiotarsienne répond à une arthrodèse simultanée de chacun de ses interlignes. Toute déviation valgisante doit être corrigée au cours de ce geste : il y va du devenir de l’interligne tibiotalien et de l’aggravation ou de la pérennisation des déformations de l’avant-pied.

À l’avant-pied, l’apparition d’une destruction de la MTP de l’hallux, de griffes fixées et de luxation des MTP des orteils fait poser l’indication opératoire.

Le geste complet et univoque intéresse l’ensemble des articulations MTP (arthrodèse de l’hallux, arthroplasties modelantes des rayons latéraux).

La présence d’une forte déviation valgisante de l’arrière-pied impose de débuter par sa correction avant d’opérer l’avant-pied.

Ainsi, l’intrication entre atteinte rhumatoïde de l’avant-pied et de l’arrière-pied, ou la participation variable des divers interlignes aux déformations aboutissent à des indications opératoires adaptées et modulées en fonction de l’importance du geste et des suites opératoires.

Plusieurs schémas peuvent être proposés : chirurgie concomitante des deux avant-pieds en cas d’atteinte isolée sans atteinte de l’arrière-pied, arthrodèse talonaviculaire et correction de l’avant-pied unilatérales, arthrodèse du couple de torsion et arthroplastie de cheville.

* Rachis cervical :

Le traitement médical des atteintes rhumatoïdes du rachis cervical comporte la prescription d’une minerve.

Cette mesure améliore fréquemment les douleurs et limite les effets neuroagressifs de la luxation, surtout quand cette dernière est instable.

En revanche, la minerve est parfois mal supportée et elle n’empêche pas à coup sûr une lente aggravation du déplacement.

Elle est systématiquement placée lors des anesthésies pour intervention aux membres.

En présence de signes neurologiques médullaires ou bulbomédullaires, l’indication est formelle et portée le plus précocement possible.

En effet, les tableaux neurologiques anciens et sévères ne s’améliorent guère après la chirurgie ; on peut tout au plus espérer leur stabilisation, d’où l’importance d’un dépistage précoce, à la fois clinique, électrophysiologique (avec notamment étude des potentiels évoqués somesthésiques [PES]) et IRM (prenant particulièrement en compte l’existence d’une impression basilaire, l’importance de la plicature de la moelle, la présence d’une petite image myélomalacique).

Dans toutes ces circonstances, le traitement chirurgical doit être décompressif et stabilisateur.

En cas de douleurs sévères et rebelles, qu’elles soient cervicales pures et/ou irradiées, le traitement chirurgical ne se discute guère.

Il use des mêmes techniques qu’en cas de troubles neurologiques.

Devant une forme asymptomatique mais d’aggravation radiologique lente, la conduite à tenir est plus discutée.

La plupart des auteurs conseillent de s’en tenir au port de la minerve, sous réserve d’une surveillance clinique régulière. Certaines données paracliniques peuvent faire anticiper la discussion chirurgicale, surtout l’instabilité de la lésion et la présence d’une impression basilaire.

Les autres données (altération des PES, apparition d’une image myélomalacique) n’ont pas une valeur pronostique clairement établie.

2- Stratégie :

La stratégie opératoire ne se pose que pour les PR présentant plusieurs sites simultanément atteints.

Au membre pelvien, en cas d’indications opératoires portées sur les trois sites, il est préférable de débuter par le pied, puis la hanche et de terminer par le genou.

En effet, les lésions cutanées des orteils et de la plante du pied sont autant de portes d’entrée septiques potentielles qu’il y a lieu d’éradiquer avant toute arthroplastie.

Le valgus calcanéen modifie d’autant l’axe mécanique du membre.

Le rétablissement d’un axe fémorotibial, condition incontournable de la longévité d’une arthroplastie du genou, impose d’avoir restitué le centre de la coxofémorale, un axe diaphysaire fémoral anatomique et un appui calcanéen normal.

Au membre thoracique, la chronologie de la chirurgie pour les trois zones articulaires a moins d’importance.

Il est préférable de débuter par les extrémités selon un ordre indifférent avant d’opérer le coude. En revanche, à la main, il est impératif, en cas de gestes multiples, de débuter par la stabilisation du carpe.

Lorsqu’il existe une atteinte des deux membres, il est judicieux d’opérer en premier le membre thoracique pour permettre au patient d’utiliser les cannes, indispensables à la période postopératoire de toute chirurgie du membre pelvien.

Dans les atteintes diffuses aux quatre membres, ces mêmes principes président, mais il est rare que les lésions soient symétriques, ce qui pousse à débuter par les articulations les plus détruites et symptomatiques.

Il faut insister sur l’importance de gestes opératoires à but préventif d’une destruction ou d’une déformation articulaire importante.

Les exemples sont nombreux : synovectomie sous-acromiodeltoïdienne, ténosynovectomie dorsale et arthrodèse partielle du carpe, synovectomie du genou, arthrodèse talonaviculaire.

Le médecin généraliste et le rhumatologue doivent reconnaître le moment opportun de tels gestes.

C’est lors du colloque médicochirurgical que le chirurgien orthopédiste propose aux patients ces différents gestes opératoires et le convainc en insistant sur le caractère inéluctable des interventions dès que le cartilage est détruit.

Conclusion :

La PR est une affection grave altérant progressivement mais inéluctablement les fonctions locomotrices.

En l’absence de traitement étiologique, le traitement médical général et local, la rééducation, le port d’orthèses ont pour but de freiner la destruction articulaire.

La chirurgie, malgré les progrès techniques, repose sur les principes d’ablation du tissu synovial pathologique et d’obtention de l’indolence articulaire par arthrodèse ou arthroplastie.

Grâce à la création de consultations multidisciplinaires, il est devenu plus rare d’avoir à poser, chez un même patient, plusieurs indications opératoires simultanées devant de nombreuses arthroplasties rhumatoïdes très évoluées.

Le plus souvent, le patient atteint d’une PR est régulièrement suivi, et les indications chirurgicales posées ponctuellement.

Chacun des praticiens prenant en charge un patient porteur d’une PR doit s’informer de l’évolution technique des autres spécialités pour les intégrer dans un schéma thérapeutique cohérent et concerté.

En particulier, le rhumatologue se doit de confier au chirurgien des patients dont les déformations articulaires sont relativement discrètes. De même, le chirurgien doit privilégier des gestes préventifs et conservateurs.

 

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